Le marché du bio à contre courant en Espagne
Le segment alimentaire « bio » semble être l'un des rares marchés à l'abri de la crise en Espagne. Alors que les prix et les volumes de ventes baissent dans l'ensemble du secteur alimentaire, le chiffre d'affaires des aliments « bio » a augmenté de 20% en 2011, et continue de progresser au même rythme en 2012. Ana Guasch, de la marque de conserves « bio » Querida Carmen, et Silvio Elías, directeur général de l'enseigne de supermarchés Veritas : fournisseur et distributeur revendiquent l'identité « bio » (photo : DR) ESPAGNE. Non, toutes les nouvelles économiques ne sont pas mauvaises en Espagne. Même s'il faut bien reconnaître qu'il s'agit d'une exception, le secteur alimentaire « bio » affiche un dynamisme remarquable. D'abord au niveau de la production : les ventes de produits issus de l'agriculture biologique ont augmenté en 2011 de 20%, selon les chiffres fournis par les organisateurs du salon BioCultura, qui se tient chaque année à Barcelone. Et la croissance devrait être identique en 2012. Ce qui se traduit par une augmentation permanente des surfaces agricoles « bio », qui atteint 16 700 km². Il est vrai que l'Espagne part de loin. La tradition du « bio » reste très récente dans un pays où la législation demeure très conciliante, par ailleurs, avec la production d'OGM (l'Espagne se positionne même en championne d’Europe sur ce terrain des organismes génétiquement modifiés, avec 97 000 ha de terrains cultivés). Le « bio » gagne donc du terrain en Espagne, dans tous les sens du terme... Mais l'augmentation des surfaces cultivées ne se veut que la conséquence d'une meilleure organisation de la filière, comme en témoigne l'exemple des producteurs espagnols de fruits et légumes spécialisés dans ce créneau, qui a su se fédérer au cours des dernières années pour développer notamment les ventes en ligne. Plusieurs centaines d'entre eux sont aujourd'hui regroupés sur le site de commercialisation directe "directodelcampo.com", ce qui leur permet de composer une offre de paniers complets de fruits et légumes en fonction des saisons. Ce type de vente en ligne s'avère d'autant plus intéressant qu'elle offre une dimension internationale. Car la plus grosse part du chiffre d'affaires global de la production alimentaire « bio » se réalise toujours hors des frontières espagnoles : les exportations représentent 57% du volume des ventes. Sur un marché qui représente au total 1,36 mrd € par an en Espagne. « Cuisine méditerranéenne bio » La filière continue de s'organiser en Espagne (DR) La marque espagnole Querida Carmen a déjà pris sa part de « gâteau » sur ce marché, et conserve un appétit prometteur. Créée il y a deux ans, la jeune entreprise de Huesca exporte déjà dans treize pays, de la Chine au Panama en passant par la Finlande, avec une offre de « conserves bio ». Aa Guasch, l'une des fondatrices de la société, se réjouit d'avoir réussi un pari qui paraissait pourtant risqué : « Nous avons pris dès le départ un positionnement très écologique, en proposant des produits semi-cuisinés sans conservateurs ni colorants, ce qui représentait une innovation sur le marché espagnol ». Le succès se traduit aujourd'hui par une gamme de onze références qui vient tout juste de s'enrichir d'une "paella aux légumes". Ce pourrait être l'occasion pour la marque de se développer sur le marché français, où Querida Carmen cherche un partenaire commercial. Avec toujours le même credo répété par Ana Guasch : " En défendant cette identité bio, nous voulons amener la cuisine méditerranéenne dans le monde.". À commencer évidemment par l'Espagne, autant que possible. Répondre aux attentes des consommateurs Dans la péninsule ibérique, Querida Carmen s'appuie notamment sur le réseau distribution des supermarchés Veritas, qui se revendique comme leader parmi les enseignes spécialisées dans l'alimentation écologique en Espagne. Veritas regroupe 4 000 références garanties « 100% écologiques » (dont 400 références à marque propre) dans ses vingt cinq points de vente, essentiellement implantés en Catalogne, où l’enseigne est née. Et pour le directeur général de la chaîne, Silvio Elías, les possibilités de croissance demeurent importantes : -"Nous progressons chaque année en répondant simplement à une demande croissante de la part des consommateurs espagnols, toujours plus préoccupés par le souci d'une alimentation à la fois saine et écologique ; nous avons eu le mérite d'être les premiers à répondre à ce besoin dès la création de notre enseigne, il y a dix ans, en intégrant dans nos rayons des produits certifiés « bio » que l'on ne trouvait pas ailleurs, comme ceux destinés notamment aux enfants." Veritas devrait maintenant profiter de son antériorité sur ce segment de l'alimentation « bio ». Car l'un des grands atouts de ce secteur reste le potentiel de développement du réseau de distribution spécialisé, qui représente tout de même déjà actuellement en Espagne 4 000 points de vente, assurant 60% de la distribution des produits alimentaires « bio ». Les 40% restants correspondant aux ventes à travers les magasins plus « généralistes », c'est-à-dire essentiellement la grande distribution qui intègre également de son côté toujours plus de produits alimentaires « bio ». Ce qui s'avère aussi un indicateur important de la capacité de croissance de ce secteur en Espagne. SOURCE WEB Par Francis Mateo, à BARCELONE - Econostrum