Le Roi Mohammed VI déclenche le processus de retour du Maroc à l'UA
Le 27e sommet de l’Union Africaine (UA) s’est ouvert ce dimanche 17 juillet à Kigali pour deux jours de travaux. Le même jour, le Roi Mohammed VI a adressé un message au 27è sommet, dans lequel le Souverain annonce la volonté du Maroc de retourner dans le grand cénacle panafricain.
C'est officiel. M. Talbi Alami, président de la Chambre des Représentants, émissaire royal, a été reçu selon un communiqué officiel, par Idriss Deby Itno, Président de la République du Tchad, Président en exercice de l'Union Africaine (UA).
A cette occasion, M. Talbi Alami a remis au Président tchadien un message adressé par le Roi Mohammed VI au 27e sommet de l'UA, qui se tient dans la capitale rwandaise. On peut penser qu'il s'agit de la demande officielle du Maroc de réintégrer le cénacle panaficain.
Le message du Roi Mohammed VI insiste sur la nécessité pour l'UA, de corriger les erreurs du passé, en se conformant désormais à la légalité internationale. En d'autres termes, en n'acceptant plus d'accueillir un pseudo membre qui n'a aucun attribut d'Etat.
Le texte intégral du message royal
Le message royal a été remis dimanche au président tchadien, Idriss Deby Itno, président en exercice de l'UA, par Rachid Talbi Alami, président de la Chambre des représentants.
Voici le texte intégral du message royal:
"C’est avec une vive émotion que je m’adresse, aujourd’hui, à notre grande et noble famille africaine.
"Je le fais en tant que petit-fils de SA MAJESTE LE ROI MOHAMMED V qui fut l’un des puissants symboles de l’épanouissement de la conscience panafricaine et l’un des artisans les plus engagés - aux cotés des Présidents Jamal Abdel Nasser, Ferhat Abbes, Modibo Keita, Sekou Touré, Kwame N’Kruma - de la Conférence historique de Casablanca de 1961, annonciatrice d’une Afrique émancipée et fondatrice de l’intégration africaine.
"Je le fais en tant que fils de SA MAJESTE LE ROI HASSAN II qui a réuni, la même année, la Conférence des Mouvements de libération des colonies sous domination portugaise en Afrique, contribué patiemment à la stabilité de plusieurs régions de notre Continent et permis de renforcer les liens d’amitié et de fraternité avec de nombreux pays africains.
"Je le fais aussi en tant que ROI D’UN PAYS AFRICAIN. Un pays dont l’identité est le fruit d’un déterminisme géographique, d’une histoire commune traversée d’évènements marquants, d’un brassage humain enrichi de siècle en siècle et de valeurs culturelles et spirituelles ancestrales.
"Un pays dont l’engagement en faveur des justes causes n’est plus à démontrer. Un pays qui a toujours été et sera toujours, animé par une foi inébranlable en une Afrique forte de ses richesses et potentialités économiques, fière de son patrimoine culturel et cultuel et confiante en son avenir.
"Le Maroc – n’étant plus membre de l’OUA - ne s’est jamais séparé de l’Afrique.
«Africain est le Maroc. Africain, il le demeurera. Et nous tous Marocains restons au service de l’Afrique… nous serons à l’avant- garde pour préserver la dignité du citoyen africain et le respect de notre Continent… ». Tels étaient les propos de Sa Majesté le Roi Hassan II, dans son Message au XXème Sommet de l’OUA, annonçant le retrait du Maroc, le 12 Novembre 1984.
"Les paroles du Regretté Souverain étaient prophétiques et la conclusion est évidente: le Maroc a tenu sa promesse.
"En effet, plus de trois décennies plus tard, jamais l’Afrique n’a été autant au cœur de la politique étrangère et de l’action internationale du Maroc.
"Il a ainsi développé un modèle unique, authentique et tangible de coopération SUD-SUD, qui a permis, non seulement, de consolider les domaines traditionnels de la formation et de l’assistance technique, mais également d’investir de nouveaux secteurs stratégiques comme la sécurité alimentaire et le développement des infrastructures.
"Ce processus n’est pas prêt de s’arrêter. Il est, hélas pour certains, irréversible.
"L’importante implication des opérateurs marocains et leur forte présence dans le domaine de la banque, des assurances, du transport aérien, des télécommunications et du logement, font que le Royaume est à l’heure actuelle le premier investisseur africain en Afrique de l’Ouest.
"Il est déjà le deuxième investisseur du continent, mais pour peu de temps encore, avec sa volonté affichée de devenir le premier.
"De plus, le Maroc appartient à deux des huit Communautés économiques Régionales relevant de l’Union Africaine, en l’occurrence l’Union du Maghreb Arabe (UMA) et la Communauté des Etats Sahélo-Sahariens (la CENSAD).
"Il jouit d’un statut d’Observateur auprès de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et aspire à un partenariat prometteur avec la Communauté Economique des Etats d’Afrique Centrale (CEEAC). Il a été, en outre, initiateur, en 2009, de la Conférence Ministérielle des Etats africains Riverains de l’Atlantique.
"Par ailleurs, la participation du Royaume à tous les partenariats bi-régionaux et bi-continentaux de l’Afrique est un témoignage supplémentaire de sa disponibilité à toujours défendre les intérêts du Continent, sur le plan international, et à mettre à contribution son réseau d’échanges au service des relations de l’Afrique avec le reste du monde.
"Enfin, fidèle à sa tradition de solidarité et à son aspiration à la paix dans le monde, le Royaume du Maroc n’a pas cessé, depuis son départ de l’OUA, de prendre de multiples initiatives en faveur de la stabilité et la sécurité.
"Il s’agit, notamment, de la contribution aux opérations de maintien de la paix en Côte d’Ivoire , en République Démocratique du Congo et en République Centrafricaine, aux efforts de médiation dans la région du «Fleuve MANO», et récemment en Libye et à la reconstruction post-conflit en Guinée, au Sierra Léone, au Mali et en Guinée Bissau.
"La liste des engagements pris par le Maroc dans ces divers domaines est trop longue à énumérer. Vous me permettrez d’en rester là, par pudeur et préséance.
"Malgré ces évidences, certains pays continuent de prétendre que le Maroc n’a pas vocation à représenter l’Afrique, parce que sa population ne serait pas majoritairement noire. L’Afrique ne se résume pas à une couleur. Continuer à l’insinuer, c’est mal conna?tre nos réalités.
"Je connais l’Afrique et ses cultures mieux que ne peuvent le prétendre beaucoup d’autres. De par mes multiples visites, je connais aussi la réalité du terrain et l’affirme en mesurant mes mots. Une réalité faite de défis quotidiens importants, de manque de ressources, mais également de dignité, d’histoires réussies et d’engagement citoyen.
"C’est pourquoi tous ceux qui dénigrent le Maroc font du tort, en fait, aux Africains eux-mêmes. La popularité du Royaume et sa dimension en Afrique, n’étant plus à démontrer, ni à prouver.
"Je ne suis pas là pour me faire le chantre de la présence du Maroc en Afrique. Les résultats parlent d’eux-mêmes et se passent de tout commentaire.
"Je ne suis pas là, non plus, pour donner des leçons à quiconque. Je respecte trop les Africains pour le faire.
"Le Maroc, qui a quitté l’OUA n’a jamais quitté l’Afrique. Il a seulement quitté une institution, en 1984, dans des circonstances toutes particulières.
"Sa relation passionnelle avec son Continent explique le sentiment légitime que la reconnaissance d’un pseudo Etat était dure à accepter par le peuple marocain.
"Il est, en effet, difficile d’admettre que le Royaume, nation pérenne et ancestrale, soit comparé à une entité ne disposant d’aucun attribut de souveraineté, démunie de toute représentativité ou effectivité.
"Cette conviction qu’il y avait là une blessure, je rêvais depuis des années de vous la confier. Aujourd’hui, s’offre l’opportunité de le faire. Et j’ai la certitude qu’elle trouvera dans cette noble assemblée une écoute attentive et sereine.
"Ce fait accompli immoral, ce coup d’Etat contre la légalité internationale, ont amené le Royaume du Maroc à éviter la division de l’Afrique au prix d’une douloureuse décision, celle de quitter sa famille institutionnelle.
"Le peuple marocain, unanime, et l’ensemble de ses forces ont estimé inacceptable cette adhésion, par effraction et connivence, d’une entité non souveraine.
"L’histoire retiendra cet épisode comme une tromperie, un détournement de procédures, au service d’on ne sait quels intérêts. Un acte comparable à un détournement de mineur, l’OUA étant encore, adolescente à cette époque.
"Comment en sommes-nous arrivés là? La réponse, J’en suis certain, tout le monde la connaît, et s’impose d’elle-même.
"Le temps est venu d’écarter les manipulations, le financement des séparatismes, de cesser d’entretenir, en Afrique, des conflits d’un autre âge, pour ne privilégier qu’un choix, celui du développement humain et durable, de la lutte contre la pauvreté et la malnutrition, de la promotion de la santé de nos peuples, de l’éducation de nos enfants, et de l’élévation du niveau de vie de tous.
"Cet impératif éthique rejette et condamne les errements du passé et les actes à contre courant du sens de l’histoire.
"Le défi qui demeure à relever, pour notre continent, plus d’une décennie après la naissance de l’Union Africaine, est celui de l’unité et de la cohésion de notre grande famille.
"Pour le réaliser, il nous faudra emprunter la voie de la lucidité et du courage, celle que nos aînés, les premiers panafricains avaient privilégiée.
"L’Afrique, si longtemps négligée, est devenue incontournable. L’ère où elle n’était qu’un objet dans les relations internationales est révolue. Elle s’affirme, progresse et s’assume sur la scène internationale. Elle se présente désormais comme un interlocuteur actif et respecté dans le débat sur la Gouvernance mondiale.
"C’est pourquoi, sur la question du Sahara, l’Afrique institutionnelle ne peut supporter plus longtemps les fardeaux d’une erreur historique et d’un legs encombrant.
"L’Union africaine n’est-elle pas en contradiction évidente avec la légalité internationale? Puisque ce prétendu Etat n’est membre ni de l’Organisation des Nations- Unies, ni de l’Organisation de la Coopération Islamique, ni de la Ligue des Etats arabes, ni d’aucune autre institution sous-régionale, régionale ou internationale?
"Mais ce qui m’intéresse plus particulièrement, c’est la position de notre Continent. L’UA resterait-elle en déphasage avec la position nationale de ses propres Etats membres, puisqu’au moins 34 pays ne reconnaissent pas ou plus cette entité?
"Même parmi les 26 pays qui s’étaient placés dans le camp de la division en 1984, seule une stricte minorité d’une dizaine de pays subsiste.
"Cette évolution positive est, d’ailleurs, conforme à la tendance observée au niveau mondial. Depuis l’année 2000, 36 pays ont retiré leur reconnaissance à l’Etat fantôme.
"L’Union africaine se trouve aussi en total décalage avec l’évolution de la question du Sahara, au niveau des Nations-Unies. Un processus est en cours, sous la supervision du Conseil de Sécurité, pour parvenir à une solution politique définitive de ce différend régional.
"L’UA ne peut donc, seule, préjuger de l’issue de ce processus. Par sa neutralité retrouvée, elle pourrait, par contre, contribuer d’une manière constructive à l’émergence de cette solution.
"Cela fait longtemps que nos amis nous demandent de revenir parmi eux, pour que le Maroc retrouve sa place naturelle au sein de sa famille institutionnelle. Ce moment est donc arrivé.
"Après réflexion, il nous est apparu évident que quand un corps est malade, il est mieux soigné de l’intérieur que de l’extérieur.
"Le temps des idéologies est révolu. Nos peuples ont besoin de concret et d’actions tangibles. On ne peut changer la géographie. On ne peut se soustraire au poids de l’histoire.
"C'est ce qui milite pour que le Maroc ne demeure pas en dehors de sa famille institutionnelle et puisse ainsi retrouver sa place naturelle et légitime au sein de l’UA. Agissant de l’intérieur, il contribuera à en faire une organisation plus forte, fière de sa crédibilité et soulagée des oripeaux d’une période dépassée.
"Par ce retour, le Maroc entend poursuivre son engagement au service de l’Afrique et renforcer son implication dans toutes les questions qui lui tiennent à cœur.
"Il s’engage, ainsi, à contribuer, de manière constructive, à l’agenda et aux activités de l’UA.
"Le Maroc, qui abritera la COP 22 en novembre prochain, saura défendre la position de notre Continent, fortement touchés par les questions climatiques et de développement durable.
"La coopération – déjà intense avec de nombreux pays sur le plan bilatéral – s’en verra amplifiée et enrichie. L’expertise et le savoir-faire du Maroc pourront, alors, se déployer sur un terrain encore plus vaste et mieux organisé.
"C’est le cas, tout particulièrement, des questions de sécurité et de lutte contre le terrorisme. L’expérience marocaine, largement reconnue sur le plan international et sollicitée par de nombreux pays – y compris européens - serait mise au service de la sécurité et de la stabilité de tous les pays africains, notamment ceux de l’Afrique de l’Ouest et Centrale.
"Cette décision de retour, réfléchie et longuement mûrie, émane de toutes les forces vives du Royaume.
"Par cet acte historique et responsable, le Maroc compte œuvrer, au sein de l’UA, en vue de transcender les divisions.
"Le Maroc se situe, aujourd’hui, dans la perspective résolue et sans équivoque, de regagner sa famille institutionnelle et de continuer avec plus d’ardeur et de conviction, à assumer les responsabilités qui sont les siennes.
"Il est confiant dans la sagesse de l’UA, pour rétablir la légalité et corriger les erreurs de parcours. Comme le dit le proverbe: «La vérité n’a point d’autre preuve de son existence que l’évidence». [Fin du message royal]
Un vote à la majorité simple au sein de la Commission
Sur place à Kigali se trouvent le ministre des Affaires étrangères Salaheddine Mezouar et le conseiller royal et ancien chef de la diplomatie marocaine Taïeb Fassi-Fihri.
Le retour du Maroc ne pose évidemment aucun problème en soi. Il y a juste une procédure à respecter, qui passe par un vote à la majorité simple au sein de la Commission.
La vraie question est l’avenir de la “rasd“ au sein de l’instance panafricaine, un membre qui n’est plus reconnu que par 17 pays au maximum et qui ne dispose pas des éléments constitutifs d’un Etat souverain. De plus, le Maroc n’accepte pas de siéger à ses côtés. La question pourrait revêtir une dimension juridique.
Elections à la tête de la Commission africaine
Trois candidats sont en lice pour succéder à la Sud-Africaine Nkosazana Dlamini-Zuma à la tête de la puissante Commission africaine : le ministre des Affaires étrangères de la Guinée Equatoriale Mba Mopuy, son homologue la Botsawanaise Pelonomi Venson-Moitoi et l’ancienne Vice-Présidente de l’Ouganda Spéciosa Wandira-Kazibwe. Un premier vote doit se tenir lundi 18 juillet.
Le 27e sommet de l’Unité africaine s’est officiellement ouvert en présence des chefs d’Etats et de gouvernements ce dimanche 17 juillet dans la capitale du Rwanda, Kigali, avec un ordre du jour très chargé. 54 membres sont représentés.
Il y a tout d’abord le dossier du Sud-Soudan, pays issu d’une scission avec le Soudan il y a cinq ans et qui replonge dans la guerre civile depuis le début de ce mois. Ce dossier constitue le grand échec de la présidence de N. Dlamini-Zuma, qui ne se représente pas à un nouveau mandat, car souhaitant préparer l’élection présidentielle sud-africaine de 2019.
Sur place, outre 40 chefs d’Etats et d’autres chefs de gouvernements et ministres des Affaires étrangères, le secrétaire général des Nations-Unies Ban Ki-moon tente de ramener le calme à Juba au Sud-Soudan.
Le dossier de la cour pénale internationale (CPI) figure également au centre des discussions entre les Africains ceux-ci jugeant que «C’est une justice à deux poids et deux mesures». Outre le fait que Kigali et le sommet de l’UA accueillent le président Omar Al-Bachir, le Rwanda n’est pas partie du Traité de Rome qui a instauré le CPI tout comme d’autres pays dont … les Etats-Unis. De nombreux Etats africains souhaitent décider d’un retrait collectif des pays du continent de la CPI.
Un premier vote ce lundi
L’élection d’un nouveau ou d’une nouvelle présidente de la commission de l’Union africaine doit intervenir ce lundi 18 juillet.
Il faut réunir les deux-tiers des voix des Etats-membres pour être élu à un mandat de quatre ans. Si les 15 Etats-membres de la Communauté des Etats d’Afrique de l’Ouest ont demandé le report de l’élection, les Etats d’Afrique de l’Est et le Rwanda pays-hôte s’opposent à tout report.
Idriss Deby, président tchadien et président de l'UA, et Paul Kagamé, président du Rwanda et hôte du sommet, reçoivent les deux premiers passeports de l'Union Africaine.
L’Equato-Guinéen Mba Mopuy est légèrement donné favori en cas de scrutin ce qui n’assure toutefois pas qu’il obtienne 66% des voix. Dans ce cas, un président intérim doit être désigné et un nouveau scrutin avec l’ouverture d’une nouvelle liste de candidats sera organisé, avec un vote intervenant en janvier prochain à Addis-Abéba. Il est peu de dire qu’aucun consensus sur un nom ne domine pour l’instant.
Selon diverses sources, les chefs d’Etat peuvent seuls décider de rouvrir la liste des candidatures au cours du somment de l’UA. Dans ce cas, le Sénégalais Abdoulaye Bathily, ancien ministre de l’Energie et actuel représentant de Ban Ki-moon pour l’Afrique centrale a les faveurs des pays de l’Afrique de l’Ouest et du Nigéria. Mais si la liste est rouverte, la Tanzanie pourrait à son tour présenter un candidat … anglophone.
Le 01 Juillet 2016
SOURCE WEB Par Médias 24
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