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Voici pourquoi les relations maroco algériennes ne vont pas s'améliorer

Voici pourquoi les relations maroco algériennes ne vont pas s'améliorer

Après notre interview avec Sid Ahmed Ghozali, ancien premier ministre algérien, l’expert en géostratégie Moussaoui Ajlaoui décrypte pour les lecteurs de Médias 24 la situation en Algérie.

Médias24: Comment interprétez-vous les récentes déclarations algériennes sur le Maroc?

Moussaoui Ajlaoui: La position de l’Etat algérien ne changera pas d’un iota sur le dossier de l’intégrité territoriale marocaine, tant qu’il n’y aura pas de passage d’un Etat militaire à un Etat civil. Le Maroc est une carte maîtresse utilisée par les parties algériennes pour alimenter la politique interne.

-Deux secrétaires généraux de partis algériens ont exprimé des positions inédites sur le Maroc?

-A la question d’un journaliste pour connaître sa position à l’égard du problème du Sahara, la réponse de Amar Saïdani, patron du FLN, a été sans ambigüité aucune.

Il a répondu que seuls les intérêts de son pays devaient primer ("L’Algérie, l’Algérie…"). Saïdani a poursuivi que s’il disait le fond de sa pensée, le peuple algérien descendrait manifester dans la rue.

Contrairement à ce que certains ont pensé, c’était une manière de faire porter le chapeau au général Toufik (ex-patron du DRS qui vient d’être limogé) sur le déclin de l’Algérie face à l’affaire du Sahara.

Le fait que le Maroc soit devenu un acteur continental et soit le seul pays stable de la région dérange les autorités algériennes. C’était un procès du général et pas du tout une volonté de rapprochement.

L’Algérie qui veut jouer un rôle majeur dans la région (conflit libyen, espace sahélo-saharien, Tunisie…) considère le Maroc comme un obstacle à ses ambitions et l’accuse de tous ses maux.

-Il n’y a donc aucun changement positif en l’air pour le Maroc?

-C’est tout l’inverse car tant que le problème de l’après-Bouteflika n’est pas réglé, de graves risques continuent de peser sur les relations maroco-algériennes.

Pour s’en convaincre, vous n’avez qu’à consulter la récente déclaration du ministre algérien des Affaires étrangères, qui se réjouissait de la position du tribunal européen contre nos intérêts agricoles.

Dois-je rappeler que malgré son état de santé, Abdelaziz Bouteflika a reçu sous l’œil des caméras il y a une quinzaine de jours Mohamed Abdelaziz, chef du mouvement polisario au palais Al Mouradia?

-N’y a-t-il aucune aile politique en Algérie même minoritaire qui soutienne la position du Maroc?

-On a présenté la dernière intervention médiatique de Louisa Hannoun, patronne du parti des travailleurs (PT), comme étant en faveur du Maroc. Depuis sa création, ce parti s’est toujours opposé à la marocanité du Sahara et aucun parti algérien ne s’est jamais prononcé pour la position marocaine.

Il faut être réaliste et arrêter de rêver à un changement de ton, alors que le Maroc est un outil essentiel dans la guerre terrible que se livrent les parties au sommet de l’Etat algérien.

-Qui sont les clans qui se disputent l’après-Bouteflika?

-Depuis l’arrivée au pouvoir du président Bouteflika en 1999, un nouveau groupe d’hommes d’affaires qui a profité de la prospérité due à la hausse du cours du baril gravite autour de sa personne. Les forces en présence sont donc les militaires de haut-rang de l’armée, ceux du DRS (Direction du renseignement et de la sécurité) et le clan des hommes d’affaires.

Lorsque Bouteflika a voulu se présenter pour un 4e mandat, le général Médiene dit "Toufik" s’y est opposé, d’où les attaques contre lui par le secrétaire général du FLN et son récent limogeage.

La nomination du général Tartag à la tête de la DRS a calmé le conflit entre la présidence et les services secrets, mais un conflit ultérieur n’est pas à exclure. Tartag ne fait pas de vagues, mais cela ne veut pas dire qu’il n’affichera pas ses ambitions un jour, car la DRS a toujours été un faiseur de rois.

-Le président Bouteflika finira-t-il son mandat?

-La question se pose, car le président a invité lundi 14 décembre des proches pour qu’ils étudient une proposition de réforme de la Constitution ayant pour but de créer un poste de vice-président. Cela peut vouloir dire que Bouteflika sent sa fin proche et veut assurer sa transition en douceur.

Cette personne sera chargée de l’accompagner jusqu’à la fin de son mandat ou le remplacera s’il devait être déclaré inapte à assumer la suite de son mandat présidentiel. Toutes les turbulences actuelles sont dictées par la perspective de l’après-Bouteflika et par le repositionnement des forces en présence au sommet de l’Etat algérien.

-Croyez-vous au scénario de Saïd Bouteflika qui succède à son frère?

-Même s’il joue actuellement un rôle avéré de marionnettiste, cela ne va pas durer, car il est fort probable que le clan Bouteflika dans son ensemble soit éjecté du pouvoir à la mort du président.

-Quels sont alors les favoris de la future élection présidentielle?

-L’ancien Premier ministre Ali Benflis a toutes ses chances, car il a constitué un bloc d’alliés qui pèse lourd dans l’échiquier politique algérien. S’il obtient le feu vert de la DRS et des hommes d’affaires, il pourrait remporter le futur scrutin.

L’autre candidat sérieux est Ahmed Ouyahia, qui a aussi été Premier ministre de Bouteflika. Le chef de cabinet du Président peut s’imposer, car il a dirigé le RND (Rassemblement national démocratique) qui a été étroitement associé au pouvoir avec le FLN. Il ne faut cependant pas exclure l’arrivée d’un candidat imposé à la dernière minute par l’armée ou la DRS.

-Et le peuple algérien dans tout ça?

-Malheureusement, il n’a pas voix au chapitre dans les choix politiques, car il a toujours été écrasé par ses dirigeants. La preuve est qu’il a toujours refusé de prendre parti clairement contre la position marocaine sur le Sahara, mais que ses gouvernants n’ont jamais tenu compte de ses positions.

-Le chaos risque-t-il de s’installer en Algérie après la mort du président?

-Le chaos non, mais la division certainement, d’autant plus que les foyers d’instabilité aux frontières de l’Algérie sont nombreux et ne vont pas s’arranger de sitôt (Libye, Mali, Niger, Tunisie…). Nous ne devons pas nous réjouir de cette situation, mais plutôt créer des relations transversales avec la société algérienne (partis politiques, société civile, médias…) pour anticiper un avenir commun.

Même si cela prend beaucoup de temps, le Maroc doit jouer cette carte, car les bonnes relations avec l’Algérie, ce n’est malheureusement ni pour demain, ni même pour après-demain.

Le 15 Décembre 2015
SOURCE WEB Par Médias 24

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