Légalisation de l’avortement : La volte-face de Benkirane
Le coup de gueule du Pr Chraibi «Des paroles et des promesses qui tardent à se concrétiser en actes et qui traduisent l’absence de toute crédibilité»
Pas question de légaliser l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Abdelilah Benkirane, chef du gouvernement a été on ne peut plus clair lors des Assises sur la protection de l’enfance, organisées récemment à Bouznika, comme cela a été rapporté par le site Lemag.ma. Difficile pour lui de se débarrasser de ces œillères qui l’empêchent de regarder en face une réalité douloureuse. Celle de centaines d’avortements clandestins qui condamnent chaque jour, les victimes à une mort certaine. Cette déclaration qui enfonce davantage le clou est loin de réjouir les activistes de la société civile et les féministes qui déplorent le fait que les lois en la matière demeurent en totale inadéquation avec la réalité du pays.
A cet égard, le professeur Chakib Chraibi, président de l’Association marocaine de lutte contre l’avortement clandestin (AMLAC) ne mâche pas ses mots. Il est bien remonté contre un gouvernement qui «n’assume pas ses responsabilités», s’est-il confié à Libé.
Et pour cause. Un coup oui, un coup non, Pr Chraibi ne comprend pas ce revirement dans le discours, qui le déçoit à plus d’un titre. Le gouvernement était pourtant bien disposé face à la problématique de l’interruption volontaire de grossesse. Et de se rappeler une rencontre qu’il a eue avec le chef du gouvernement en janvier 2012 et lors de la laquelle ce dernier a manifesté un soutien total à son combat et demandé à ses ministres de préparer un projet de loi pour la légalisation partielle de l’avortement. Et depuis, silence radio, aucune nouvelle. « Des paroles et des promesses qui tardent à se concrétiser en actes et qui traduisent l’absence de toute crédibilité». Idem pour le ministre de la Santé, Houcine El Ouardi, au demeurant fort hésitant. «Bien qu’il se dise interpellé par la question, il ne la présente toujours pas comme une priorité», regrette amèrement notre interlocuteur
«Pourtant Saâdine Al Othmani, ex- ministre pjidiste, était allé même très loin en autorisant l’IVG non seulement en cas de viol ou d’inceste mais pour des situations sociales, ce qui ouvre une grande porte. C’est encore avec le PJD que nous avons organisé la première journée d’étude au Parlement, en 2009. Mais apparemment, c’est plus pour des enjeux électoralistes que pour sauvegarder les intérêts des citoyens», ne manque pas de préciser le président de l’AMLAC.
Peut-être bien que légaliser l’avortement est une façon d’encourager la prostitution, d’où la réticence du gouvernement ? Un argument que rejette vigoureusement Pr Chraibi. «Ce n’est pas parce qu’il y a un médicament qu’on tombe malade», précise-t-il. Et d’ajouter: « En Tunisie où l’avortement a été légalisé depuis 1971, on enregistre moins 20% d’IVG qu’au Maroc». Selon lui, on ne peut indéfiniment ignorer toutes ces femmes en souffrance, pour la plupart suicidaires, et ces bébés abandonnés que la rue recueille à bras ouverts. Un vrai drame en fait mais qu’on pourrait éviter, autant faire se peut, en agissant à titre préventif. Pour ce, rien de tel que d’instaurer des programmes éducatifs spécifiques pour mettre en garde les enfants contre les risques d’abus, «et pour interpeller davantage sur cette problématique, nous comptons organiser une marche», conclut Pr Chraibi.
Samedi 19 Avril 2014_SOURCE WEB Par Nezha Mounir Libération
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