ENQUÊTE L’ECONOMISTE-SUNERGIA: BENKIRANE PERD LA MOITIÉ DE SES POINTS, MAIS TIENT ENCORE LA CORDE
LE CHEF DU GOUVERNEMENT RÉUNIT 45% DE MAROCAINS SATISFAITS
LES INSATISFAITS MULTIPLIÉS PAR 4 EN DEUX ANS…
…MAIS ILS RESTENT MINORITAIRES
«Les gens comprennent bien que je dois prendre des mesures difficiles (…) ils voteront encore pour nous la prochaine fois», nous confiait le chef de gouvernement, il y a quelques jours
APRÈS deux années de pouvoir, ce n’est pas si mal de n’avoir perdu «que» la moitié de ses électeurs. Si Benkirane étai un coureur de fond, on dirait qu’il tient la corde et jouit donc d’une position avantageuse. Et surtout un 45% de gens «satisfaits » ou «très satisfaits» est extraordinairement bon, quand on voit les scores détestables que réalisent les hommes politiques occidentaux, qui naviguent entre 20 et 35% d’opinions favorables après deux ans de pouvoir.
Et moins encore pour le président
français, François Hollande. Au Maroc, on n’aime pas la politique, on trouve
son personnel complètement nul. Du moins c’est ce qu’on dit dans les salons. Il
n’empêche qu’on fait confiance à son gouvernement. C’est bizarre mais c’est
comme ça. Abdelilah Benkirane nous confiait il y a quelques semaines que «les
électeurs comprennent parfaitement les mesures difficiles de redressement q u e
( j e d o i s ) prendre». Il ajoutait confiant: ils voteront encore pour nous
au prochain scrutin. On l’aura compris, les mesures difficiles ce sont les
hausses de l’essence que son gouvernement réalise à minima.
L’enquête de Sunergia lui donne raison:
il domine encore la scène politique, même si c’est de moins haut qu’il y a deux
ans. S’il allait aux élections aujourd’hui, pas de doute, le chef du
gouvernement serait reconduit.
Qui soutient Benkirane?
Ceci dit, cela ne signifie pas que la carte politique n’a pas changé en deux ans. Bien au contraire. Réalisée avec beaucoup de soins, sur un grand échantillon, l’étude montre des mouvements de fonds. En réalité il y a, d’abord et avant tout, une sorte de migration vers l’indifférence, puis vers l’insatisfaction.
Et à l’intérieur de cette migration, il y a des inversions de place. On se souvient, par exemple les protestations publiques sur le manque de femmes au gouvernement… et pendant ce temps-là, ce sont les femmes qui soutenaient le chef du gouvernement. Les hommes eux s’en méfiaient un peu.
La fiche technique détaillée de Sunergia
C’EST le bureau d’études Sunergia qui a mené l’enquête pour le compte de L’Economiste. Le questionnaire a été administré au cours de la dernière décade de mars, par téléphone, de manière à obtenir plus 1.000 questionnaires complets et valides. L’échantillon est appuyé sur le recensement de 2004 (le dernier disponible) mais redressé par les projections 2010. Il est essentiel de souligner que l’enquête n’a pas été faite à partir d’Internet. En effet, Internet laisse passer toutes sortes de déformations, voire autorise de vraies manipulations. On peut donc considérer sans risque que les résultats sont exactement représentatifs de la population marocaine dans son ensemble. Pour plus de précisions: L’échantillon compte 490 femmes et 510 hommes; 590 urbains et 410 ruraux. Les catégories sociales sont représentées à raison des 13 de A-B, 57% de C et 30% de D-E. Il ne s’agit donc pas que des cadres (L’Economiste et Sunergia enquêtent régulièrement, sur d’autres sujets), mais bien de l’ensemble des Marocains. 23% des interrogés ont entre 18 et 24 ans, 25% entre 25 et 34 ans, 20% entre 35 et 44 ans, 18% ont entre 55 et 64 ans. Et les plus de 65 ans représentent 9% de l’échantillon. Les répartitions sont exactement représentatives de la population marocaine dans son ensemble. 28% des répondants résident dans la région de Casablanca-Chaouia Ouardigha; 23% dans le Tadla Azilal- Marrakech Agadir; 16% dans le Gharb et Rabat-Salé; 14% vivent dans la région de l’Oriental avec Taza, Al Hoceïma et Taounate; 12% habitent la région de Fès-Meknès et la région de Tanger-Tétouan compte pour 7%. En 2014, changement de tempo: les hommes soutiennent alors que les femmes sont devenues plus hésitantes vis-à-vis de Benkirane et de son deuxième gouvernement. Même phénomène si on regarde les classes d’âge. Le leader du PJD plaisait plus aux jeunes. Deux ans plus tard, ses soutiens sont davantage chez les adultes.Encore cette balance entre les ruraux et les urbains. Maintenant l’étoile de Benkirane brille plus dans le rural qu’auprès des urbains. Et, en plus, on observe nettement une migration des soutiens vers le sud du Royaume. Néanmoins ces changements ne doivent pas être surdimensionnés. Nous sommes devant des amplitudes assez faibles si Le pouvoir use. Benkirane a perdu la moitié de ses fans en deux ans. A noter que la question de Sunergia en 2014 était exactement, mot pour mot, la question des années précédentes. Il n’est pas impossible que la formulation de 2014 ait légèrement avantagé le chef du gouvernement on les regarde une par une. Les petits ruisseaux faisant la grande rivière, en fin de parcours, Benkirane passe en dessous de la barre des 50% de satisfaits. Sa chance, c’est qu’en face, les mécontents ne sont pas agrégés dans une majorité claire. Un Marocain sur cinq se déclare neutre, plus 6% qui ne veulent pas répondre. En fait, la vraie leçon, c’est que Benkirane est devenu un homme politique marocain presque normal. Ce n’est plus le Benkirane des premiers mois de pouvoir, adoré de ses troupes, et regardé avec une curiosité bienveillante par les autres. Mais personne ne le vouera aux gémonies. Un homme normal, mais tout de même bien plus intéressant que ses prédécesseurs à ce même poste.
Qui rouspète?
PAS grand monde, à vrai dire.
Il n’y a guère de catégories où le chef du gouvernement est décrié. Quand il l’est c’est avec beaucoup de En deux ans, l’environnement de Benkirane a beaucoup évolué. Les insatisfaits sont à 31% (contre seulement 8% qui se disaient inquiets deux ans plus tôt). Le nombre des gens qui lui font confiance s’est sérieusement réduit et passe sous la barre des 50%. Quant aux hésitants, ils se sont multipliés par trois mesure. Les 25-34 ans sont majoritairement mécontents, mais d’une courte tête. Il perd aussi sa majorité dans l’Oriental et dans la région de Tanger-Tétouan, mais là encore d’une toute petite poignée de voix. C’est-à-dire que, dans ces deux catégories, les mécontents sont à peine plus nombreux que les satisfaits. Cela ne fait pas une majorité, loin s’en faut Benkirane II et son équipe ne fâchent réellement personne. Ils rencontrent un mécontentement diffus, et surtout minoritaire. Dans une élection, les 45% de gens contents l’emportent facilement contre les 31% d’opposants. Cette configuration veut simplement dire que le gouvernement sera compliqué à construire, mais que le chef sera toujours Benkirane.
10 Avril 2014_SOURCE WEB Par N. S L’Economiste
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