Arrêt d’exécution de 15 MMDH de dépenses d’investissement pour 2013
Coupes budgétaires : les explications du gouvernement
Idriss Azami Al-Idrissi, ministre délégué auprès du ministre de l’Économie et des finances chargé du Budget
● Pour éviter l’aggravation du déficit budgétaire, le gouvernement a décidé d’arrêter l’exécution de 15 MMDH d’investissement au titre de 2013.
● Même avec ces coupes budgétaires, le gouvernement assure garder le même niveau d’investissement qu’en 2012.
● Il rappelle qu’il y a une enveloppe de crédits reportés d’investissements de 21 milliards de DH, auxquels il faut ajouter 58 milliards de DH prévus pour 2013, ce qui porte le total à 79 milliards de DH.
L’information sur les coupes budgétaires dans les dépenses d’investissement alimente les débats depuis qu’elle a été officialisée par le gouvernement. Hommes politiques, spécialistes et journalistes, tout le monde y est allé de son commentaire et de son analyse. Certains se sont même empressés de qualifier la décision de «catastrophique». Mais le gouvernement, qui a choisi de surseoir par décret à l’exécution de 15 milliards de DH de dépenses d’investissement au titre de 2013, estime avoir agi dans le souci de consacrer les principes de la bonne gouvernance en matière de gestion des finances publiques. Il affirme également qu’il entend ainsi améliorer la programmation de l’exécution des crédits et accélérer leur réalisation au titre de l’exercice 2013.
Mustapha El Khalfi, ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, avait souligné, à l’issue du Conseil de gouvernement, que «cette mesure concerne l’ensemble des dispositions prises par le gouvernement pour faire face aux répercussions de la conjoncture actuelle sur l’équilibre des finances publiques». Idriss Azami, ministre chargé du Budget, a indiqué dans une déclaration au «Matin» que «cette décision a pour objectif de consacrer une meilleure gouvernance en matière d’exécution des dépenses d’investissements et de permettre une meilleure visibilité sur les objectifs du déficit budgétaire». Techniquement, le responsable gouvernemental a justifié cette mesure par l’enveloppe globale d’investissements à fort impact sur le budget. «Après avoir analysé le déficit public de 2012, on s’est rendu compte qu’au niveau de dépenses d’investissements, nous avons une enveloppe de crédits reportés d’investissements de 21 milliards. Celle-ci vient s’ajouter aux 58 milliards de DH d’investissements ayant été programmés dans le cadre de la loi des Finances 2013.
Et au final, on s’est retrouvé ainsi avec une enveloppe de 79 milliards de DH d’investissements. Chose qui pèse lourdement sur le budget».
Sur ce registre, il convient de rappeler que l’enveloppe de crédits reportés d’investissement a grimpé de 9 milliards en 2005 à 21 milliards de DH en 2012. Pour Idriss Azami, cette situation s’explique, d’une part, par l’effort d’investissement public qu’a connu le Maroc lors de ces dernières années. Et d’autre part, par le niveau d’exécution. «L’enveloppe d’investissement public a été multipliée par 2, voire 4. Et en parallèle, la capacité d’absorption de ce niveau d’investissements publics n’a pas pu suivre. Ainsi, cette enveloppe de crédit reporté s’est aggravée d’année en année, en raison du fait que les départements n’ont pas pu suivre le rythme d’augmentation des investissements publics ayant été programmés ces dernières années», précise le ministre chargé du Budget, qui s’est montré ferme d’ailleurs quant à la nécessité de remédier à cette situation de crédits reportés. «Nous ne pouvons pas continuer avec une enveloppe de crédit à ce niveau-là. Parce qu’il y va de la visibilité et de la prévisibilité du déficit budgétaire.» Quels projets d’investissement seront touchés par cette coupe ? Pour le moment, rien n’a été décidé encore.
Car, d’après M. Azami, «les projets seront arrêtés par les différents départements ministériels en concertation avec le département des Finances. La sélection des projets se fera en fonction de leur état d’avancement ainsi que les priorités des ministères».
En tout cas, le recours à ces coupes budgétaires était la seule solution pour l’équipe de Benkirane pour faire face aux aléas de la conjoncture. Et comme l’a souligné Abdessalam Seddiki, économiste et membre du bureau politique du PPS, «au point où sont arrivées les choses avec un déficit de 7%, il fallait bien prendre une décision pour arrêter l’hémorragie». À priori, «il est regrettable que le gouvernement ait eu recours à une telle mesure, mais il reste à savoir dans les détails quels sont les secteurs touchés. S’agit-il des projets qui sont en cours ou des projets qui sont programmés ?» s’est-il interrogé. Abdessalam Seddiki se montre toutefois rassurant. «Si on améliore le taux de réalisation des investissements qui sont en cours, on peut se rattraper malgré le gel de ces 15 milliards de DH. D’autant plus que le taux de réalisation des investissements au cours des années précédentes ne dépassait pas 60% dans le meilleur des cas». Mais aux yeux de cet économiste, cela ne dispense pas le gouvernement d’entamer des réformes de fond. Des réformes qui ne doivent en aucun cas toucher au pouvoir d’achat des citoyens, car l’austérité n’est pas la bonne solution. Dans tous les pays où des mesures d’austérité ont été adoptées, la situation ne s’est pas améliorée», a-t-il indiqué. Et d’ajouter que la réforme fiscale et celle de la compensation s’avèrent nécessaires et doivent aller de pair. Pour le moment, le gouvernement compte maintenir l’effort d’investissement à travers l’accélération des investissements des entreprises publiques et l’encouragement de l’investissement privé. Des mesures qui viennent s’ajouter à d’autres, telles que l’annulation des majorations de retard. «Nous comptons ainsi avoir un effet bénéfique sur le recouvrement. D’ailleurs, nous avons élaboré des mesures dans le cadre du renforcement du rôle des services fiscaux.
Ce sont là autant de leviers qui agiront sur la gouvernance du cadre macroéconomique et une maîtrise du déficit budgétaire», a souligné Idriss Azami.
La coupe budgétaire comme mesure de relance
Le ministre chargé du Budget, Idriss Azami, se veut rassurant ! «Même avec la réduction de ces 15 milliards de DH, nous allons rester au même niveau d’investissement qu’en 2012». Mieux encore, «la coupe budgétaire est une mesure de relance dans le sens où elle maintient le déficit budgétaire à un niveau finançable. Autrement dit, à un niveau où la dette publique ne jouera pas par l’effet d’éviction vis-à-vis du financement de l’économie en général. Chose qui permettra ainsi le financement du Trésor et de l’économie nationale», précise M. Azami. Et de rappeler : «cette réduction est une mesure de relance dans la mesure où elle maintient des conditions de financement de l’économie nationale qui sont des conditions en faveur de l’investissement privé».
Repères
- L’enveloppe de crédit reporté s’est aggravée d’année en année en raison de la faiblesse du rythme de réalisation.
- Les projets concernés seront sélectionnés en fonction de leur état d’avancement.
Publié le : 7 Avril 2013 –
SOURCE WEB Par Soumaya Bencherki, LE MATIN
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