Pêche artisanale : Journée d’études au profit des coopératives
L’importance du mouvement coopératif dans la promotion et l’encadrement des activités de pêche artisanale n’est plus à démontrer
Cependant, la dynamique actuelle de création des coopératives, qui entre en droite ligne dans les orientations stratégiques du Maroc en matière d’économie sociale et de promotion des activités génératrices de revenus, nécessite un recentrage des objectifs, une mise au point des modalités de gestion, et une plus grande synergie entre toutes les composantes du tissu coopératif.
C’est dans ce cadre que s’inscrit la Journée d’études sur le réseautage et la restructuration du mouvement coopératif dans le secteur de la pêche maritime organisée dernièrement à Agadir par le ministère de l’Agriculture et de la Pêche maritime en partenariat avec la Chambre des pêches maritimes de l’Atlantique centre Agadir.Cette journée, à laquelle ont pris part les artisanale de toutes les représentants des coopératives de pêche régions maritimes du Royaume, a été animée par les responsables centraux du département de la pêche et de l’Office de développement de la coopération (ODCO), l’objectif étant de créer un espace de concertation et d’échange d’expertise entre responsables et acteurs du secteur, tout en faisant le point sur la situation du mouvement coopératif
Ils ont dit
Abdessamad Lamrani, directeur de la
formation maritime et de la promotion socio-professionnelle au ministère de l’Agriculture
et de la Pêche
maritime, Département de la pêche maritime : «La rencontre d’aujourd’hui
est organisée par la
Direction de la formation maritime et de la promotion
socio-professionnelle en partenariat avec la Chambre maritime Atlantique-centre. L’objectif
étant d’étudier les modalités de mise en réseau des coopératives dans le but de
renforcer leurs capacités en matière de pêche responsable en vue de la
durabilité et la préservation de la ressource, de gestion administrative
et financière et de planification des activités, et également de la prise
en charge de la promotion professionnelle et sociale des adhérents, à savoir
les marins-pêcheurs. Et donc , de pouvoir aussi développer des activités
génératrices de revenus qui leur permettront de réfléchir à des projets
de commercialisation du produit de leur pêche et de constituer des réseaux de
commercialisation pour pouvoir pénétrer des marchés nouveaux internes ou des
marchés à l’extérieur du pays».
Abderrahman Sarroud, président de la Chambre des pêches
maritimes de l’Atlantique-centre : « Aujourd’hui, on a tenu une rencontre des
coopératives qui travaillent dans le secteur de la pêche maritime, soit
85 coopératives. C’est la première journée qu’on organise cette année.
L’objectif, c’est d’abord l’encadrement de ces coopératives pour qu’elles
puissent travailler au même niveau que les coopératives agricoles qui sont très
avancées dans ce domaine. Par contre, celles de la pêche maritime ont encore
des problèmes de gestion financière, administrative, de formation, de
commercialisation, etc. Donc, l’objectif aujourd’hui est de montrer à
leurs présidents des exemples, de leur donner des idées afin qu’ils puissent
mieux gérer leurs coopératives. Ceci d’une part, d’autre part, nous voulons
créer un réseautage entre toutes ces coopératives, et plus tard, créer une
union des coopératives de la pêche maritime au Maroc. Enfin, il s’agit
également de sensibiliser les responsables aux avantages que présentent les
coopératives. Comme vous le savez, ces avantages sont énormes. Les coopératives
constituent une véritable force de négociation des prix soit au
niveau de l’achat de tous les équipements dont les marins-pêcheurs ont besoin,
soit au niveau de la valorisation et la commercialisation des produits
halieutiques
Les interventions d’aujourd’hui ont toutes abordé la commercialisation parce
que c’est le gros problème des coopératives. Il faut aussi revoir pas mal
de lois. Nous appliquons des lois très anciennes qui ont besoin d’être
revues pour qu’elles puissent répondre aux attentes des coopératives, chose que
nous allons demander bien sûr. Puis, il y a une expérience dont on a
beaucoup parlé, c’est celle des coopératives qui se réunissent pour vendre
leurs produits aux grandes surfaces . Il y a des exemples à Casablanca et
dans le Nord du pays. C’est avantageux pour elles parce que ça leur
permet d’écarter les intermédiaires et de vendre leurs produits à
de très bons prix ; même l’acheteur est gagnant parce qu’il achète la marchandise
à des prix intéressants. Lorsqu’on élimine l’intermédiaire, on augmente
la marge bénéficiaire du producteur et on baisse le prix d’achat pour
l’acheteur. C’est le contexte général des coopératives. C’est donc
la première rencontre, et il y en aura d’autres l’année prochaine en
coordination avec le ministère et ce, en prélude à une rencontre
euro-méditerranéenne qui aura lieu en France l’année prochaine avec la
participation du Maroc et qui verra la participation de tous les pays d’Europe.
Là-bas, ils ont des coopératives très fortes. Les Européens sont très en avance
dans ce domaine. Ils négocient même le gas-oil, les chantiers navals, les
équipements de pêche qu’ils achètent à des prix préférentiels et les revendent
ensuite à leurs membres. Et justement, c’est ça notre objectif final . Bien
sûr, on n’y arrivera pas du jour au lendemain, il nous faut encore
du temps parce qu’actuellement, la gestion des coopératives est catastrophique.
C’est le président qui gère, qui achète, qui vend, qui sort en mer,
qui débarque la capture. Or, un président ne peut pas tout faire. Donc,
la coopérative doit être une structure bien organisée, avec un
directeur, un responsable commercial , un responsables achat, un responsable
financier. Il faut qu’ils puissent travailler dans de bonnes conditions.
Ceci pose le problème de la formation, de la ressource financière…. Mais, nous
avons des modèles à suivre. Il y a celui de l’agriculture où les producteurs
ont leur coopérative, les exportateurs aussi. Donc, il y a des modèles à suivre.
C’est ça le contexte général de l’atelier national d’aujourd’hui. Il y a
trois experts qui sont intervenus. Ils ont parlé du réseautage des
coopératives, de leur création et de leur gestion. Ils ont donc donné aux
présidents des coopératives du Maroc réunis ici, à Agadir, des idées pour
qu’ils puissent bien gérer leurs coopératives»
Abderrahmane Zitouni, acteur associatif dans
le secteur de la pêche maritime à Sidi Ifni et représentant de la Chambre maritime : « C’est
une rencontre très importante. Mais nous aurions souhaité qu’il y ait des
commissions pour examiner toutes les questions. Le plus important dans ce
domaine, c’est la démocratie et la transparence qui fait
malheureusement défaut à de nombreuses coopératives du secteur et qui est
à l’origine de tous les problèmes qui entravent leur développement. On
peut ajouter aussi l’absence de formation administrative et comptable qui
constitue un frein à l’épanouissement des coopératives de pêche maritime en
général. »
Abdelfettah Belefdil , président de la coopérative COPMAS (Coopérative des pêches maritimes artisanales du Souss), représentant du secteur de la pêche artisanale au Conseil régional et membre de la Chambre des pêches maritimes Atlantique -centre : « Cette journée est très importante pour les coopératives de la pêche artisanale au Maroc. Ce secteur a une grande importance parce qu’il regroupe une frange de la société aux revenus très limités. Le secteur souffre de précarité économique et sociale. Nous nous réunissons aujourd’hui dans le cadre d’une journée de sensibilisation, organisée par le Département de la pêche maritime en partenariat avec la Chambre maritime. C’est une journée importante parce que les coopératives de pêche artisanale rencontrent de nombreux problèmes. Elles n’ont pas de registre de commerce pour pouvoir commercialiser leurs produits, ce qui est une entrave à toute opération de commercialisation et de valorisation de ces produits dont la vente pourrait constituer une bonne source de revenu qui en garantirait la pérennité. Il faut souligner aussi que ce secteur n’a que trop souffert des intermédiaires qui monopolisent le marché aussi bien au niveau des ports que des points de débarquement. Je vais vous donner un exemple. Aujoud’hui, le marin vend du merlan de grande qualité à 18 dirhams le kilo à ces intermédiaires alors que le consommateur achète la même marchandise à Casablanca ou à Rabat entre 80 et 100 dirhams le kilo. Cela veut dire que le marin qui l’a pêché au péril de sa vie ne gagne rien. Si l’on fait un simple calcul des heures passées en mer (18 heures environ), ça ne représente même pas 1 dirham l’heure. C’est une misère quoi. Au niveau de la région Souss-Massa-Drâa et de la Chambre maritime Atlantique-centre, nous avons essayé à plusieurs reprises de nous réunir avec les responsables de l’Office national des pêches pour mettre fin à ce monopole avec l’aide des autorités locales. Il faut que les coopératives soient mieux organisées, mieux gérées et bien encadrées et leur membres bien formés afin qu’elles puissent jouer pleinement leur rôle et valoriser leurs produit en le commercialisant aussi bien sur le marché intérieur qu’extérieur. »
Jeudi 30 Décembre 2010
Source : WEB Libération par M’BARK CHBANI