Agenda 21 Région Guelmim Es Smara
Monceyf Fadili : Conseiller UN-HABITAT Expert auprès de l'Agence du Sud
Avec la récente visite royale dans les provinces du Sud, les villes d'Assa et de Tata occupent, aujourd'hui, le devant de la scène du développement local. Cet événement, qui a notamment été celui des chantiers en marche, des initiatives de mise à niveau urbaine et des défis du développement social, aura permis de découvrir des formes urbaines fortement marquées par leur contexte environnemental. Assa et Tata, deux villes oasiennes, entre autres caractérisées par l'éloignement géographique et l'aridité du climat, essaient, dans la dynamique de développement des provinces du Sud et de la région de Guelmim-Es-Smara, de s'inscrire dans des logiques de développement territorial en harmonie avec les impératifs du développement humain, symbolisé par l'INDH.
Assa et Tata présentent aujourd'hui leur profil environnemental, état des lieux de toute ville ouverte sur l'association et la concertation avec l'ensemble des acteurs locaux. Cette démarche originale, également initiée –pour les provinces du Sud – dans les villes de Guelmim, Tan-Tan et Tarfaya, a pour cadre d'intervention ‘'l'Agenda 21 local'', programme d'action de développement local et instrument d'aide à la prise de décisions en faveur des collectivités locales, pour un projet de ville partagé, aujourd'hui adopté par plus de 6.500 villes à travers le monde, dans le cadre de la gouvernance locale Cette démarche, véritable exercice de démocratie locale et de dialogue entre les acteurs du développement, est le résultat du partenariat entre l'Agence du Sud, les municipalités, le ministère de l'Habitat, de l'Urbanisme et de l'Aménagement de l'espace, le ministère du Développement social, de la Famille et de la Solidarité et le Programme des Nations unies pour les établissements humains (UN-HABITAT) Assa, une cité émergente.
La ville d'Assa est située à 100 km au sud-est de Guelmim et à 300 km au sud d'Agadir. Elle représente, avec son territoire, un exemple caractéristique des zones frontalières marquées par l'éloignement des centres de prise de décisions, une situation d'enclavement et des conditions de développement difficiles, que ne favorisent pas un environnement et un climat particulièrement arides. Longtemps marquée par une situation vécue à la marge, la ville, qui compte aujourd'hui 13.000 habitants, connaît un nouvel élan du fait de l'intérêt stratégique que lui porte l'Etat à partir de 1991, en lui donnant le statut de province. Aux fonctions économiques locales basées sur l'agriculture oasienne, l'élevage et le commerce, vient s'ajouter une structure d'encadrement par la mise en place d'institutions qui vont rapidement générer la réalisation d'infrastructures et d'équipements de base, nécessaires relais aux mutations que connaît la société locale, dont la plus marquante est la transition d'un mode de vie nomade à un mode de vie sédentaire. Assa se trouve au centre des patrimoines naturel et cultuel, dont la nécessaire préservation et la valorisation sont à l'ordre du jour. Sa configuration géographique, synthèse entre un développement urbain en cours et un écosystème oasien de 145 hectares de surface agricole utile, traversé par l'oued Assa, est fortement empreinte des symboles du ‘'ksar'', de sa zaouia et de ses traditions, témoins d'un des hauts lieux du commerce caravanier et d'une présence humaine ancienne attestée par des gravures rupestres. Il s'agit aujourd'hui pour cette petite ville des provinces sahariennes de répondre au défi d'un développement local au service de tous, appuyé par les principes d'intégration et de durabilité, du fait d'une vulnérabilité environnementale et d'une forte demande sociale, véhiculée par les jeunes et leurs associations. S'il est incontestable que les interventions engagées ont largement contribué à l'amélioration des conditions de vie des habitants, il reste à créer la dynamique économique génératrice d'emplois et de revenus escomptée afin d'atténuer le sentiment de dépendance et de forte attente, dans une société connue pour son dynamisme et sa mobilité.
Pour passer d'une logique d'assistanat et d'Etat-providence à une logique de développement intégré et durable, à laquelle participe activement l'Agence du Sud à travers son vaste programme de mise à niveau urbaine et des développements économique et social, il s'avère utile d'engager une réflexion collective susceptible de valoriser le capital humain, les ressources et les potentialités que recèlent la ville et la région
Parmi les thèmes à débattre et exprimés par les acteurs locaux figurent.
• le développement des activités agricoles et la préservation des ressources naturelles
• la mise à niveau urbaine et l'amélioration des services publics
• le tourisme articulé au développement local.
Tata, une ville de piémont.
Centre urbain promu chef-lieu de province en 1977 et commune urbaine en 1992, Tata est située sur la route nationale n° 12 dite «route des oasis» reliant Sidi Ifni à Erfoud. A égale distance d'Agadir et de Guelmim (280 km), la ville intègre –comme Assa– la région de Guelmim-Es-Smara et compte 15.000 habitants. Localisée au confluent de deux oueds, la ville représente, avec son chapelet d'oasis et ses nombreux ‘'ksour'', l'un des principaux points de rencontre entre l'Anti-Atlas, le Jbel Bani et les vastes espaces sahariens, attesté de longue date par ses gravures rupestres –principale concentration à l'échelle du Maroc –, son commerce caravanier et son savoir-faire local
L'écosystème oasien (Agadir Lahna, Agoujgal, Tighremt, Indfiane, Taourirt, Addis, etc.), avec 102.000 pieds de palmiers-dattiers et 623 hectares de surface agricole utile, représente un véritable patrimoine naturel et culturel, dont la richesse est à la mesure de sa fragilité, du fait de la raréfaction des ressources en eau et de la désertification, dans un contexte de forte aridité, d'urbanisation croissante, de pression anthropique sur le couvert végétal et de prolifération du bayoud (champignon à l'origine de la régression d'importantes superficies de palmiers-dattiers). Ce contexte particulier, où l'activité urbaine s'organise essentiellement autour de l'agriculture, n'empêche pas la désaffection pour un secteur en crise, qui se redéploie aujourd'hui vers le commerce et les services, voire l'administration, et dont l'une des issues est trouvée dans la migration vers d'autres centres. La ville et son environnement disposent pourtant de potentialités certaines à valoriser, au plan du savoir-faire artisanal et des métiers d'art (bijouterie, ferronnerie, vannerie, tissage), mais également de l'exploitation des patrimoines naturel, culturel et architectural au travers de la promotion d'un tourisme dans une optique d'intégration locale.
Au plan institutionnel, la présence des principales représentations d'encadrement, notamment les autorités locales, l'Agence du Sud et ses partenaires locaux, permet de répondre globalement à la demande locale en termes d'infrastructures et d'équipements de base, avec des manques persistants en matière d'assainissement, de gestion des déchets et de formation à l'emploi, notamment en faveur des jeunes pour qui partir reste souvent l'alternative. Le Conseil municipal joue un rôle appréciable, notamment dans le domaine social et les initiatives de coopération décentralisée axées sur l'accompagnement sanitaire, relayé par un secteur associatif dynamique
(75 associations actives) et marqué par l'ancrage des traditions de travail collectif en milieu oasien. La ville de Tata est à replacer autour de sa fonction d'espace-carrefour et de lieu de passage entre la zone montagneuse et les espaces sahariens. La configuration géographique de la ville et les potentialités qu'elle recèle donnent ainsi tout leur sens à cet espace urbain au sein d'un vaste écosystème oasien, véritable patrimoine naturel aujourd'hui menacé.
Dans un contexte d'attentes et de besoins de la population, où les ressources de la ville et de sa région côtoient de fortes contraintes et des dysfonctionnements liés à l'environnement et au contexte économique local, la ville de Tata est aujourd'hui confrontée au nécessaire équilibre entre la création d'une dynamique locale et la fragilité du milieu et des ressources naturelles. Dans cette perspective, le processus ‘'Agenda 21 local'', tel qu'engagé, a permis de traduire la préoccupation commune des acteurs locaux pour un développement intégré et participatif de leur ville, exprimée à travers les problématiques suivantes :
• l'amélioration des conditions de vie :
• la mise à niveau du système oasien
• la gestion des ressources naturelles et la lutte contre la désertification
• le développement d'un tourisme adapté aux potentialités locales.