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Sud Maroc Et Les Phoques Moines: L’étude des phoques-moines du Cap Blanc a eu son martyr : Didier Marchessaux

Sud Maroc Et Les Phoques Moines:  L’étude des phoques-moines du Cap Blanc a eu son martyr : Didier Marchessaux

Au début des années 1980, la CCE décida de confier au Parc naturel de Port Cros une étude de faisabilité sur « la création d'un centre d'étude du Phoque moine en Méditerranée occidentale ». Didier Marchessaux en fut chargé de l'étude. Simultanément, le WWF et l'IUCN lui confièrent un programme de recherche mais aussi un projet de conservation et de gestion du phoque moine au Cap Blanc. Didier mènera alors avec brio ce travail grâce auquel naîtra en avril 1986 la première réserve au monde pour le phoque moine. Passionné, il maîtrisait parfaitement son sujet. Les phoques  de cette réserve n'avaient aucun secret pour lui qui les avait baptisé l'un après l'autre : Nouchka, Amadeus, Brian, Simplet, etc... Comme pour ne pas les oublier, Didier réalisa un film vidéo intitulé : « La vie de Brian ».

Fin 1985, un document co-signé avec Natacha Muller de l'Université Aix-Marseille III, fit le point sur la présence des phoques dans la péninsule du Cap Blanc et sur leur comportement. C'est aussi en juin 1985, que Didier attirera l'attention des instances scientifiques internationales sur la nécessité de sauvegarder cette espèce, en animant sur l'île de Port-Cros le « Séminaire sur la stratégie de conservation du phoque moine » à l'initiative du ministère français de l'Environnement et de la CEE. L'une des conclusions de ce séminaire était de recommander la mise en place d'un programme de reproduction en captivité du phoque moine.

Une affaire qui fit grand bruit... En 1986, le ministère français de l'environnement confie au Parc de Port-Cros, un programme pilote de reproduction du phoque moine en captivité. Pour le mener à bien, le parc recrute officiellement Didier Marchessaux en tant que chargé de mission. Dès lors, ses périples le mènent dans les différents pays susceptibles d'accueillir encore quelques phoques moines.

Puis le ministère entreprend la recherche d'un lieu pour la reproduction en captivité. Des installations adaptées n'existent pas. Construire et faire fonctionner un tel centre serait trop couteux. Finalement, c'est le Marineland d'Antibes qui se propose. Le ministre signa alors un accord avec son directeur qui prenait tout en charge à certaines conditions : le bassin et la zone de vie des phoques moines ne devaient en aucun cas être accessibles à des non-scientifiques. En 1987, les divers accords nécessaires furent obtenus, France, Maroc et Mauritanie (les grottes ne sont pas mauritaniennes mais on part de Mauritanie pour y accéder, et accord du comité scientifique.

Départ de la polémique : De violentes critiques ne tardèrent pas à s'élever, y compris parmi des partenaires, contre ce projet de création d'un groupe captif de phoques pour la reproduction. Ce fut le cas du Centre de Pieterburen et de ses scientifiques, puis du WWF, de la Fondation de Bellerive et de la SPA au nom du caractère « inacceptable » des spectacles du Marineland. Selon les cas, c'était le principe de la capture ou le lieu de détention qui posait problème. Mais, après d'intenses discussions au sein du Conseil de l'Europe (convention de Berne), le projet fut quand même validé. Bruxelles s'étant déclaré favorable mais sans participer puisque l'Europe mettait tous ses soutiens financiers dans le plan de sauvegarde des phoques en Grèce. La destination réelle de cet argent a d'ailleurs fait l'objet de plusieurs enquêtes car la protection des phoques ne semble pas en avoir profité.

La Marine Nationale marocaine fut envoyée au larges de la côte des grottes avec des plongeurs, des cages et du matériel pour essayer de capturer des phoques. Le mauvais temps, très fréquent sur zone, empêcha les plongeurs d'atteindre la grotte désignée. L'expédition rentra sans phoques et ensuite on ne parla plus du programme, officiellement clos en 1995. L'intensification de la campagne des ONG hostiles avait fini par faire reculer les autorités des pays implique?s. Une autre source signale que le prince Agha Khan, bienfaiteur de nombreuses ONG internationales, intervint fermement.

En janvier 1988, avec l'aide de l'Office National des Pêches du Maroc, Didier Marchessaux dirigea une mission de prospection au Sud de Dakhla à laquelle participa Taha Aouab, directeur de l'aquarium de Casablanca. En octobre 1988, Didier partit pour sa dernière mission à l'étranger. Il se rendit tout d'abord à la Réserve du Cap Blanc saluer ses amis phoques : Brian, Poutch et les autres, puis s'en alla plus au nord visiter des grottes qu'il connaissait déjà dans lesquels il n'était jamais encore descendu. Le dimanche 16 octobre, avec la Land Rover du Parc national du Banc d'Arguin, le chauffeur Elye Ould Elemine et trois autres compagnons, Alain Argiolas, Patrice Francour et Gérard Vuignier, ils atteignirent ces grottes, les explorèrent consciencieusement pour découvrir avec ravissement une population florissante de phoques adultes et de jeunes. Ils repartirent heureux, mission accomplie mais invisible et cruel destin, une mine les attendait sur le chemin du retour le long de la côte. Didier et ses compagnons périrent dans l'explosion; seule Patrice Francour survécut à ses blessures. En fait, on ne sait pas exactement ce qui s'est passé (mine, obus, tir). Didier laissa au Cap Blanc les phoques qu'il voulait tant sauver et protéger et, en France, sa jeune épouse Dominique et un bébé de cinq mois, Laura.

Didier, sous la direction du professeur Boulière était à ce moment là en train de terminer la rédaction d'une thèse de Doctorat qui devait présenter la synthèse de toutes les connaissances acquises sur le phoque moine. Avec l'aide du professeur, de Françoise Moutou, de son épouse Dominique Marchessaux et de Christine Pergent-Martini, et grâce au soutien financier accordé par le directeur du parc de Port-Cros, put se terminer la rédaction de cette thèse. La soutenance à titre posthume eut lieu à Marseille, le 10 mai 1989. Didier fut remplacé par Angela Caltaglione, jeune scientifique franco-italienne qui s'est investie avec énormément de ténacité dans le projet.

* Marchessaux, D. et Muller, N. (1987). Le Phoque moine, Monachus monachus. Distribution, statut et biologie sur la co?te saharienne. Parc National de Port-Cros.

* Marchessaux, D. et Aouab, T. (1988). Le Phoque moine sur le littoral atlantique du Royaume du Maroc. Parc National de Port-Cros et Office National des Pe?ches du Royaume du Maroc.

* Marchessaux, D. (1989) : Recherches sur la Biologie, Ecologie et le Statut du Phoque Moine (Monachus monachus). Rapport sur l’Etat de l’Environnement du Maroc. Thèse d’Etat, Faculté des Sciences de Luminy, Marseille II, 285 pages in Biodiversité et Milieu Naturel - Documents pour le développement.

« A 31 ans, Didier Marchessaux ne laissa pas seulement une œuvre scientifique que bien des chercheurs pourraient lui envier au soir de leur carrière; il a agi concrètement et efficacement au niveau de tous les organismes nationaux et internationaux pour jeter les bases du sauvetage d'une espèce pas comme les autres : riche du passé de notre civilisation et de ses mythes, riche de notre avenir et de notre capacité à le maîtriser... » Charles F. Boudouresque 

Sources :

* Population de phoques moines (monachus monachus) de Mauritanie, par Patrice Francour*, Didier Marchessaux**, Alain Argiolas***, Pierre Campredon**** et Ge?rard Vuignier*. Revue La Terre et la Vie 1990.

* Registre Phoque-moine dans le cadre de la politique environnementale de la Commission des Communaute?s Europe?ennes. Sea mammal research unit. Cambridge

Institut royal des sciences naturelles de Belgique. 1994

La gazette des grands prédateurs n°37, septembre 2010.

* Le projet phoque moine français (1984-1995) par G. Simon et Fr. Moutou

* Préparons le retour du phoque moine par Stéphane Nataf.

SOURCE WEB PAR PATRICK Simon AMDGJB

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