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Patrimoine culturel Elément fondamental de la conscience nationale à préserver

 Patrimoine culturel  Elément fondamental de la conscience nationale à préserver

 

Le patrimoine national qui atteste du riche passé et de l’Histoire millénaire du Maroc se trouve souvent à l’abandon, non identifié ni classé scientifiquement. Les quelques lois qui lui ont été dédiées sous le protectorat et après l’indépendance ne suffisent pas pour lui assurer une protection efficace et garantir sa transmission aux générations futures. Une prise de conscience se dégage aujourd’hui pour préserver cette mémoire menacée d’effacement qui se décline en un projet de loi relatif à la protection, à la conservation et à la mise en valeur du patrimoine culturel marocain.

Ses initiateurs y rappellent que, situé au carrefour de trois mondes : l’Afrique, la Méditerranée et l’Europe, le Maroc a connu depuis la nuit des temps une superposition et un brassage prodigieux de civilisations telles que l’histoire et la géographie en offrent rarement. De ce passé remarquable, le Maroc a hérité un patrimoine pluriculturel dont l’originalité, la valeur et la richesse sont universellement reconnues. Facteur d’identité, il constitue aujourd’hui un élément fondamental de notre conscience nationale et une richesse transmissible qui porte nos valeurs et principes communs aux générations futures.

 

 

Historiquement, le Maroc est un des pays à avoir apporté une attention forte à son patrimoine au nom de l’intérêt général et ce, depuis longtemps. Cette prise de compte a comme point de départ le Dahir chérifien du 29 novembre 1912 relatif à la conservation des monuments historiques et des inscriptions historiques. Depuis lors, La législation marocaine a connu, une évolution notable matérialisée par les différentes modifications du texte de loi dont les principaux sont :

- Le Dahir du 13 février 1914 relatif à la conservation des monuments historiques, des inscriptions et des objets d’art et antiquités de l’Empire Chérifien, à la protection des lieux entourant ces monuments, des sites et des monuments naturels ;

- Le Dahir du 21 juillet 1945 relatif à la conservation des monuments historiques et des sites, des inscriptions, des objets d’art et d’antiquité et à la protection des villes anciennes et des architectures régionales ;

- Le Dahir du 25 décembre 1980 relatif à la conservation des monuments historiques et des sites, des Inscriptions, des objets d’art et antiquités.

L’évolution de la société marocaine, l’urbanisation accélérée de ces dernières décennies et les méfaits d’une mondialisation iconoclaste ont eu des incidences regrettables sur le patrimoine culturel national. La question du devenir de notre héritage culturel se pose donc avec acuité ;

-notamment face à la désuétude des textes législatifs, limités dans une conception « Monumentale » du patrimoine, alors que les critères normatifs actuels universellement reconnus intègrent des aspects immatériels ou communautaires comme le savoir-faire et ses détenteurs ou des aspects liés aux paysages culturels.

Ainsi, le projet de loi en question vient renforcer et se substituer aux dispositions stipulées par la loi n° 22-80 promulguée par le Dahir du 25 décembre 1980 relatif à la conservation des monuments historiques et des sites, des Inscriptions, des objets d’art et antiquités, harmoniser le dispositif juridique national relatif à la protection, la mise en valeur et la transmission du patrimoine culturel national avec les critères internationaux auquel le Maroc a adhéré et intégrer les nouveaux concepts internationalement reconnus en matière du patrimoine culturel, essentiellement en ce qui concerne la création et de la protection des “ensembles historiques et traditionnels” et des “paysages culturels” le patrimoine culturel subaquatique et le patrimoine culturel immatériel…

Le projet de loi est élaboré en considération des éléments suivants :

- La richesse et la diversité du patrimoine national qu’il soit culturel, matériel et immatériel, et le rôle primordial qu’il joue dans la préservation de l’identité nationale et le développement durable ;

- La diversité des affluents du Royaume du Maroc et sa contribution à l’enrichissement et à la valorisation de la culture nationale ;

- Le fait que ce patrimoine constitue une richesse nationale et partie intégrante du patrimoine de l’humanité toute entière ;

- La reconnaissance constitutionnelle du Royaume du Maroc des droits de l’Homme tels qu’ils sont universellement reconnus ;

Il rappelle que volonté universelle d’instaurer un système de protection, de préservation, de conservation et de sauvegarde du patrimoine culturel sous toutes ses formes, y compris ses modalités préventives, en vue de faire face aux risques de toutes les formes d’altération, de dégradation et de ce qui peut lui porter atteinte ou de disparition ;

Reconnaissant le rôle d’intérêt général de l’Etat et de ses prolongements dans la protection et la valorisation du patrimoine culturel;

Le projet de loi évoque l’évolution universellement admise de la notion de patrimoine culturel et naturel et leur profonde interdépendance et l’importance de leur transmission aux générations futures ;

Considérant l’importance primordiale de disposer d’instruments juridiques adéquats et appropriés pour préserver ce patrimoine culturel;

Il rappelle, aussi, les engagements internationaux du Royaume du Maroc dans le domaine de la protection du patrimoine culturel, dûment ratifiés ; vu la Constitution, notamment son préambule.
La loi a pour objet de définir l’ensemble des biens culturels, déclinés dans la présente loi sous les vocables de patrimoine national culturel, d’édicter les règles générales de leur protection, préservation, sauvegarde et valorisation et d’en fixer les conditions de mise en œuvre.
Aux termes de l’article 2 de la loi sont considérés :

- Patrimoine culturel national s’étend à tous les biens culturels mobiliers, immobiliers et immatériels, par nature ou par destination, et mobiliers existants sur et dans le sol des immeubles du domaine public ou privé de l’Etat, ou appartenant à des collectivités ethniques sous tutelle de l’Etat, à des personnes physiques ou morales de droit privé, ainsi que dans le sous•sol et espaces subaquatiques des eaux intérieures et des eaux territoriales maritimes nationales, légués par les générations passées, de la préhistoire à nos jours et représentant un intérêt pour la civilisation nationale ou universelle ;

- Patrimoine naturel national s’étend à tout site ou monument, généré par la nature, ou zone ou formation naturelle ainsi que toute composante de la nature et du paysage qui revêt un caractère exceptionnel ;

- Patrimoine mixte s’entend du patrimoine culturel et patrimoine naturel dans leur interdépendance.

Selon l’article 3, le patrimoine culturel du Maroc tel qu’il est défini ci-dessus est propriété de l’Etat, à l’exception de celui dont le régime de propriété est légalement établi privé ou particulier au titre de bien habous ou collectif ethnique.

Le patrimoine culturel immobilier

Tout bien culturel immobilier qui présente une valeur nationale et/ou universelle exceptionnelle du point de vue de l’Histoire, de la science ou de l’art. Il s’agit notamment de :

- Les Sites et monuments: les monuments, œuvres architecturales de toute nature dont notamment les architectures régionales et locales spécifiques, œuvres de sculpture ou de peinture monumentales, éléments ou structures à caractère archéologique, (inscriptions, gravures ou peintures rupestres, grottes, monuments funéraires…), constructions militaires (forteresses ou murailles…), ouvrages à caractère civil (ponts, khettaras, aqueducs, bassins, jardins historiques, greniers…), sites à caractère sacré ou religieux (lieux de culte relevant ou non du régime des biens habous…), sites industriels (les friches, les mines, les usines, les manufactures ou autres installations d’époque…)… ;

- Les ensembles historiques et traditionnels, biens immeubles construits ou non, isolés ou réunis, tels que les médinas, les villages, les ksours, les casbahs, les tissus historiques urbains et ruraux qui présentent un intérêt dû à leur architecture, leur unicité, leur harmonie et leur intégration dans leur environnement.

La notion d’”ensemble” couvre par extension :

- Les villes mortes, témoins archéologiques, visibles et figés d’un passé révolu ;
- Les villes historiques vivantes ;

- Les villes nouvelles, présentant des traits d’intérêt à la fois historique, architectural et artistique.

Le patrimoine culturel mobilier 

Ce sont, notamment, les biens meubles constitués de trouvailles fortuites ou lors de prospections et/ou de fouilles archéologiques préhistoriques (le matériel lithique, les restes fauniques, les vestiges humains…) ; d’objets d’antiquité (les inscriptions, les monnaies, les valeurs numismatiques …) ; de manuscrits et d’archives (tel que défini dans la loi 66-99 relative aux archives) ; d’œuvres d’art (peintures, sculptures, estampes, photographies, films ou tout autre support électronique numérisé...) ; d’objets de la vie quotidienne (collections ethnographiques) ou d’objets de la production matérielle de la culture nationale, qui, du point de vue scientifique, historique, anthropologique, artistique, esthétique ou traditionnel, ont une valeur nationale et/ou universelle, qu’ils soient des éléments isolés ou de collections. La collection est réputée une et indivisible du fait qu’elle provient d’un même lieu ou d’une même époque et qu’elle témoigne de courants de pensées, d’us et coutumes, d’une identité, d’un goût, d’un savoir•faire, d’un art ou d’un événement…

Le patrimoine culturel subaquatique

Toutes les traces d’existence humaine présentant un caractère culturel, historique ou archéologique qui sont immergées, partiellement ou totalement, périodiquement ou en permanence, depuis 100 ans au moins, se trouvant sous les eaux intérieures et sous les eaux territoriales maritimes nationales, notamment, les sites, les structures, les bâtiments, les objets et restes humains ou fauniques, épaves de navires, aéronefs ou autres véhicules ou engins, en partie ou en totalité avec leur cargaison ou autre contenu, ainsi que leur contexte archéologique et naturel.

Le patrimoine culturel immatériel

Le patrimoine culturel immatériel est défini comme étant l’ensemble des pratiques, représentations, expressions, connaissances et savoir•faire, ainsi que les instruments, objets, artefacts et espaces culturels qui leur sont associés que les communautés, les groupes et les individus relevant de l’espace marocain dans ses frontières authentiques, reconnaissent comme faisant partie de leur patrimoine culturel.

Font partie de ce patrimoine la langue, la littérature, la musique, le chant, le conte, la danse, les événements festifs et les autres arts, les jeux, les mythes, les rites, les coutumes, les pratiques, le savoir et le savoir•faire ancestral de l’artisanat, de l’architecture, de l’art culinaire, de la production et de la conservation des produits, de la médecine et la pharmacopée traditionnelle ainsi que les espaces et itinéraires culturels, lieux d’affirmation et de perpétuation de l’identité nationale, témoins de l’enracinement de la culture marocaine et participant de son universalité.

 

 

Le patrimoine mixte culturel et naturel

Le patrimoine mixte est assimilé aux paysages culturels. Il s’agit de l’œuvre conjuguée de l’homme et la nature. Cette conjugaison témoigne de l’interaction entre l’homme et son environnement et doit présenter un intérêt pour l’histoire, la science, l’art ou la tradition une valeur nationale et/ou universelle.

Commission nationale et police de la protection du patrimoine culturel

Au terme de l’article 5, il est institué auprès de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture :

- Une “commission nationale du patrimoine culturel “ dont la mission est de nature consultative, en charge d’émettre son avis et de présenter des propositions de protection et de classement du patrimoine dans ses dimensions culturelles, meubles ou immeubles matérielles ou immatérielles, telles que définies à l’article 4 de la présente loi.

La commission nationale du patrimoine culturel est aussi sollicitée à donner son avis sur les programmes et les projets relatifs à la protection, la conservation, la réhabilitation et la mise en valeur du patrimoine ainsi que sur les demandes d’autorisation de recherches et de fouilles archéologiques, dont celles effectuées à titre préventif.

- Une “police de la protection du patrimoine culturel” dont la mission est de constater les infractions à l’égard de la présente loi.

Les attributions, la composition et le fonctionnement de la commission nationale du patrimoine culturel et de la police de protection du patrimoine culturel sont fixés par voie réglementaire.

Régimes de protection du patrimoine culturel

Selon l’article 6, les biens culturels immobiliers et mobiliers, tels que définis à l’article 4, quel que soit leur statut juridique, sont soumis, à des fins de protection et de mise en valeur, à l’un des régimes de protection ci•dessous énoncés en fonction de leur nature et de la catégorie à laquelle ils appartiennent :

• L’enregistrement sur la liste indicative ;

• L’inscription au Registre national de l’Inventaire ;

• Le classement. Le classement est une mesure de protection définitive.

Les ensembles historiques et traditionnels et les paysages culturels peuvent être érigés, à des fins de protection et de mise en valeur, en secteurs sauvegardés qui donneront lieu à l’élaboration de plans de gestion et de mise en valeur.

Les biens culturels peuvent aspirer à une inscription sur la liste du patrimoine mondial et bénéficier à ce titre d’une protection supplémentaire.

L’article 7 prévoit qu’une autorité gouvernementale en charge de la Culture dresse, tient à jour et publie un Registre national des inventaires du patrimoine culturel, dénommé ci-après le “registre national d’inventaire”, et prend, par voie réglementaire, toutes les dispositions nécessaires à la protection de l’ensemble du patrimoine culturel national. Font partie de ce Registre :

·        l’Inventaire national du patrimoine culturel immobilier ;

·        l’Inventaire national du patrimoine culturel mobilier ;

·        l’Inventaire national du patrimoine culturel immatériel ;

Au titre de l’interdépendance des sites culturels et naturels dits sites mixtes, l’Inventaire de ce patrimoine est établi en concertation avec l’autorité gouvernementale en charge de l’Environnement et l’autorité gouvernementale en charge de des Eaux et Forêts.
Les éléments et les biens du patrimoine culturel inventoriés sont publiés par, arrêté de l’autorité gouvernementale en charge de la culture, au Bulletin officiel tous les deux ans.

Inventaire du patrimoine culturel immobilier

Selon l’article 8, Il est établi par l’autorité gouvernementale de la culture à des fins de protection et de mise en valeur, un Registre national de l’Inventaire.

L’inscription des biens culturels immobiliers au registre national de l’inventaire s’effectue à partir d’une liste indicative définie par les services compétents de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture.

La liste indicative est un procédé technique et administratif ayant pour finalité fondamentale a sélection à l’échelle nationale ou régionale, d’un bien culturel immobilier, sur la base d’une connaissance scientifique et technique établissant sa valeur patrimoniale, requérant de ce fait sa protection et sa mise en valeur à titre d’urgence ou de simple instance éventuelle de classement.
La liste indicative des biens culturels immobiliers portée au Registre national de l’Inventaire fait l’objet d’une mise à jour tous les deux (2) ans.

Au titre de l’article 9, les biens culturels immobiliers qui, sans justifier un classement immédiat, présentent un intérêt du point de vue de l’histoire, de l’archéologie, des sciences, de l’anthropologie et de l’art appelant des mesures de protection, de préservation et de sauvegarde, peuvent être portés sur le Registre national de l’Inventaire.

L’article 10 dispose que l’inscription des biens culturels immobiliers au Registre national de l’Inventaire est prononcée par arrêté de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture, après avis de la commission nationale du patrimoine culturel, sur sa propre initiative, ou à l’initiative du propriétaire du bien concerné ou de toute personne physique et morale y ayant intérêt.
Les modalités, les conditions et les dispositions d’inscription au registre national de l’inventaire sont fixées par voie réglementaire.

Selon l’article 11, l’arrêté d’inscription au Registre national de l’Inventaire fait l’objet d’un affichage au siège de la commune du lieu de situation de l’immeuble pendant deux (2) mois consécutifs. Il est notifié par l‘autorité gouvernementale au propriétaire du bien culturel concerné.
L’article 12 prévoit qu’à compter de la date de publication au Bulletin Officiel de l’arrêté d’inscription au Registre national de l’inventaire, les biens culturels immobiliers inscrits au registre national de l’inventaire appartenant à l’Etat, aux Habous, aux Collectifs ethniques régis par le Dahir du 27 avril 1919 organisant la tutelle administrative des collectivités ethniques et/ou ceux soumis à d’autres régimes particuliers sont inaliénables et imprescriptibles.
Les biens culturels inscrits appartenant à des personnes privées, physiques ou morales, peuvent être cédés. Toutefois, cette cession est soumise aux conditions prévues par les dispositions de la présente loi relatives au droit de préemption de l’Etat.

Les propriétaires sont aussi tenus de saisir l’autorité gouvernementale en charge de la Culture de tout projet de restauration ou de modification de l’immeuble qui aurait pour conséquence d’enlever, de faire disparaître ou de supprimer les éléments qui ont permis son inscription audit Registre et qui risquent ainsi de porter atteinte à l’intérêt qui en a justifié la préservation.
Selon l’article 13, le propriétaire d’un bien culturel immobilier inscrit au Registre national de l’Inventaire ne peut procéder à aucune modification susvisée de ce bien sans avoir obtenu l’autorisation préalable de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture qui doit faire notifier sa réponse dans un délai maximum de deux (2) mois à compter de la date du dépôt de la demande.

En cas d’opposition expresse et motivée de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture aux travaux envisagés, une procédure de classement d’office peut être engagée en vue de protéger le bien culturel concerné conformément aux dispositions des articles 17 et suivants de la présente loi.

L’article 14 prévoit que l’inscription d’un bien culturel immobilier sur le registre national de l’inventaire entraîne tous les effets du classement pendant cinq (5) ans. Ils cessent de s’appliquer si au terme de ce délai le bien culturel immobilier n’est pas classé.
Selon l’article 15, l’inscription sur le registre national de l’inventaire met à la charge des propriétaires, personnes publiques ou privées, une obligation d’entretien et de garde du bien culturel immobilier.

L’article 16 stipule que peuvent bénéficier à ce titre de l’assistance technique des services spécialisés de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture, les propriétaires privés du bien en vue de sa conservation dans les conditions requises.

Classement des biens culturels immobiliers

Au titre de l’article 17, es biens Culturels immobiliers, tels que définis à l’article 4 de la présente loi, sont classés, par décret , sur proposition de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture sur sa propre initiative ou sur l’initiative de toute personne physique ou morale y ayant un intérêt, après avis de la commission nationale du patrimoine culturel et du Conseil communal concerné. Ledit conseil doit intervenir dans un délai maximum de 45 jours sans quoi il est réputé favorable.

Dans le cas des biens culturels immobiliers privés, l’autorité gouvernementale en charge de la Culture doit notifier au propriétaire du bien culturel immobilier l’engagement de la procédure de classement de son bien. Ce dernier est tenu de donner son avis sur le classement du bien concerné dans un délai de (45) jours sans quoi il est réputé favorable.

Les biens culturels immobiliers appartenant à l’Etat, aux Habous, aux Collectifs ethniques régis par le Dahir du 27 avril 1919 organisant la tutelle administrative des collectivités ethniques et/ou ceux soumis à d’autres régimes particuliers, sont classés, après avis de l’autorité gouvernementale sous laquelle le monument se trouve placé dans un délai maximum de quarante cinq (45) jours.

Les modalités, les conditions et les dispositions du classement des biens culturels immobiliers sont fixées par voie réglementaire.

Selon l’article 18, l’autorité gouvernementale en charge de la Culture est tenue de diligenter une enquête préalable au classement selon les procédures fixées par voie réglementaire.
Le propriétaire est tenu de donner son avis sur le classement du bien concerné dans un délai de quarante•cinq (45) jours à partir de la date de publication de l’acte administratif portant ouverture de l’enquête préalable au classement. Faute d’avoir été exprimé dans ce délai, il est réputé favorable.

Au titre de l’article 19, est assimilé à un bien culturel classé tout bien culturel qui fait l’objet d’une enquête en vue de son classement pendant la durée d’un an à compter de la date de publication au bulletin officiel de l’acte administratif portant ouverture de l’enquête précitée.
Si, au terme de ce délai, le décret prononçant le classement du bien n’est pas publié, l’enquête est considérée comme caduque.

Le classement ne peut être prononcé qu’après une nouvelle enquête dans les mêmes conditions que la première. Dans ce cas, le bien culturel n’est plus soumis à l’assimilation prévue à l’alinéa précédent.

L’article 20 prévoit que le décret de classement s’étend aux abords des biens culturels immobiliers, publics ou privés, nus ou bâtis, dont la conservation est nécessaire pour la protection et la sauvegarde desdits biens culturels, dans une zone de protection qui consiste en une relation de visibilité entre le bien culturel historique et ses abords desquels il est inséparable.
Le champ de visibilité est fixé à un minimum de deux cents (200) mètres. Son extension est laissée à l’appréciation de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture sur proposition de la commission nationale du patrimoine culturel.

Au titre de l’article 21, le décret de classement comporte, s’il y a lieu, l’établissement de servitudes et d’autres zones de protection comme indiqué dans l’article 40.

Le décret de classement est publié au Bulletin officiel, et éventuellement dans la presse nationale, puis notifié par l’autorité gouvernementale en charge de la Culture aux propriétaires, qui se chargent d’en aviser d’éventuels locataires ou occupants du bien concerné, à l’autorité communale du lieu du monument qui se charge de l’afficher au siège de la commune pendant au moins deux (2) mois consécutifs.

L’article 22 précise qu’à compter de la date de publication du décret de classement du bien culturel au Bulletin Officiel, et en prenant e considération les dispositions de l’article 19 ci•dessus, tous les effets du classement s’appliquent de plein droit au bien culturel immobilier, ainsi qu’aux immeubles bâtis ou non bâtis situés dans la zone de protection.
Selon l’article 23, le décret de classement donne lieu à l’apposition d’une plaque indiquant que le bien culturel immobilier est un bien protégé.

L’article 24 ajoute que décret prononçant le classement est inscrit sur le titre foncier si l’immeuble est immatriculé ou s’il fait ultérieurement l’objet d’une immatriculation.
Cette inscription est effectuée soit d’office, soit à la demande de l’administration ou à celle du propriétaire de l’immeuble.

Elle est exempte de toutes taxes et droits.

L’article 25 précise que le classement établissant des servitudes entraînant à une modification quant à la destination ou à l’état des lieux ouvre droit à indemnité.

Au terme de l’article 26, n’ouvre droit à indemnité que l’établissement de servitudes qui changent la destination, l’usage et l’état des lieux à la date de publication du décret de classement.
Il ne peut être accordé d’indemnité que pour le dommage direct, matériel, certain et actuel résultant de l’établissement des servitudes visées au premier alinéa. L’indemnité est réduite ou refusée dans la mesure où il est établi que le propriétaire tire avantage du classement du bien. Aucune indemnité n’est due lorsque le propriétaire a acquis le bien alors qu’il était déjà classé.
Selon les articles 27à 30, a demande en indemnité est formulée conformément à la réglementation en vigueur et sous peine de forclusion dans un délai de quatre (4) années à partir de la publication au Bulletin officiel du décret de classement. Passé ce délai, ce droit tombe. Le montant de l’indemnité est fixé par accord amiable. En cas de désaccord, il est fixé par voie judiciaire.

Les servitudes d’alignement et, d’une manière générale, les servitudes énumérées dans la législation applicable aux biens immeubles immatriculés ou inclues dans les documents d’urbanisme, qui pourraient entraîner la dégradation des immeubles classés, ne sont pas applicables à ces derniers.

L’autorité gouvernementale en charge de la Culture peut, si elle juge qu’un bien culturel immobilier quel que soit le propriétaire, nécessite des travaux de conservation ou de restauration, adresser une mise en demeure au propriétaire du bien immobilier pour entreprendre les travaux de conservation et/ou de restauration, dans un délai de trois (3) mois.

Le délai passé et devant l’opposition du propriétaire à l’exécution de ces travaux, l’autorité gouvernementale en charge de la Culture peut exécuter ces travaux d’office et à la charge et aux frais du propriétaire.

L‘Etat peut contribuer aux travaux de conservation, de restauration et de réhabilitation du bien culturel immobilier classé. Le taux de contribution est fixé, par l’autorité gouvernementale en charge de la Culture, au cas par cas et dans les limites d’un pourcentage à définir par arrêté de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture.

L’article 31 prévoit que devant l’urgence, l’autorité gouvernementale en charge de la Culture peut ordonner par arrêté, l’exécution par ses soins aux frais de l’Etat et après en avoir avisé le propriétaire, les travaux prescrits à l’article 29ci-dessus.

A cette fin, l’autorité gouvernementale en charge de la culture peut autoriser l’occupation temporaire des biens immobiliers concernés ou des immeubles voisins. L’autorisation d’occupation temporaire est notifiée aux propriétaires intéressés. Toutefois, l’occupation ne peut excéder le temps des travaux et en aucun cas une année.

L’indemnité éventuellement due au propriétaire direct est fixée à l’amiable ou par voie judiciaire.
Les articles 32 et 44 prévoient que les travaux de conservation et de restauration des biens immobiliers, indiqués aux articles 29 et 30 ci-dessus, relevant des régimes des Habous, du domaine public ou privé de l’Etat ou des Collectivités locales ou ethniques sont à entreprendre par ces derniers, à leurs frais, et sous le contrôle de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture.

L’autorité gouvernementale en charge de la Culture peut procéder, conformément à la réglementation en vigueur, au nom de l’Etat, à l’expropriation pour cause d’utilité publique d’un bien culturel immobilier déjà classé ou proposé pour classement et d’une manière générale tout bien culturel immobilier présentant une valeur pour l’Histoire, la Science, l’Archéologie, les Arts et les Traditions du Maroc.

La mesure d’expropriation peut être appliquée aux zones de protection destinées à isoler, dégager, assainir ou mettre en valeur un bien immobilier classé et de façon générale à tout immeuble nu ou bâti, situé dans son champ de visibilité.

L’immeuble non classé visé par la mesure d’expropriation est soumis au régime applicable à un immeuble classé par assimilation et par conséquent tous les effets du classement lui sont appliqués de plein droit.

Protection des biens culturels immobiliers non classés

Au titre de l’article 34, l’affectation d’un bien culturel immobilier, à des utilisations non conformes aux exigences de la sauvegarde et de la protection, implique l’intervention de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture pour édicter les modifications nécessaires ou pour mettre fin aux utilisations incompatibles.

Les articles 35 à 39 prévoient que, lorsqu’un bien culturel immobilier est exposé à un danger certain nécessitant une intervention urgente, l’autorité gouvernementale en charge de la Culture prend par arrêté, sans avis préalable et notifié au propriétaire, toutes les mesures préventives, y compris le classement d’office, en vue d’éviter les menaces de ruine, de démolition, de dénaturation ou d’altération.

Les dispositions, sus-indiquées à l’article 35, sont applicables pour ordonner la suspension des travaux portant atteinte à l’entité même d’un bien culturel immobilier, à ses éléments décoratifs et ou architecturaux et, d’une façon générale, à son identité d’origine.
Les travaux de restauration et de réhabilitation apportés aux demeures traditionnelles et aux immeubles situés dans un site culturel ou dans un ensemble historique et traditionnel, notamment ceux érigés en secteurs sauvegardés, ne doivent pas porter atteinte au plan initial ni aux formes architectoniques ancestrales tels que Riad, Patio et autres éléments architecturaux.
L’autorisation des travaux accordée par les services compétents doit être visée par l’autorité gouvernementale en charge de la Culture.

Par la suite, les travaux autorisés de restructuration et de réhabilitation doivent être effectués sous le contrôle impératif de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture.
Les différents services de l’Etat, les Collectivités Locales, les Etablissements publics et les personnes privées physiques ou morales sont tenus de prendre toutes les mesures nécessaires de protection, de conservation, de réhabilitation et de mise en valeur des biens culturels immobiliers présentant une valeur pour l’Histoire, la science, l’art ou la civilisation nationale et/ou universelle dont ils sont propriétaires, affectataires ou dépositaires.

Les dépenses nécessitées par ces mesures, citées à l’article 38, notamment les frais de conservation et de restauration, nonobstant les aides publiques prévues à cet effet, sont à la charge du département gouvernemental, de la Collectivité Locale, de l’Etablissement public, ou de personnes physiques ou morales privées propriétaires affectataires ou dépositaires de ces biens culturels immobiliers.

Le contrôle de ces travaux est du ressort des services compétents relevant de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture.

Toute aide financière de l’Etat relative à ces mesures peut être précisée par voie réglementaire.

Abords des biens culturels immobiliers

Au terme de l’article 40, il est créé autour des biens culturels immobiliers protégés ou classés, nus ou bâtis, publics ou privés, ainsi qu’autour des ensembles historiques et traditionnels, des zones de protection de 200 à 500 mètres. Les prescriptions spéciales en matière d’architecture et de paysage instituées à l’intérieur de la zone de protection sont annexées au décret prononçant le classement.

Selon l’article 41, l’autorité gouvernementale en charge de la Culture peut, après avis de la commission nationale du patrimoine culturel, des autorités gouvernementales en charge de l’Aménagement de l’espace, de l’Environnement et de l’Urbanisme et celui du Conseil communal concerné, procéder si nécessaire, à l’extension ou à la réduction de la zone de protection initiale. Lorsque l’extension ou la restriction concerne un domaine forestier, l’avis de l’autorité gouvernementale en charge des Eaux et Forêts est également requis.
Aucune servitude ne peut être établie sur un bien culturel classé sans l’avis favorable de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture.

Au titre de l’article 42, aucun type de travaux, ne peut être entrepris dans le périmètre des zones de protection instituées en vertu de l’article 40ci•dessus qu’après autorisation expresse de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture notamment :

- Les travaux de construction, de démolition, de déboisement, de transformation ou de modification de l’aspect qui en forme les caractères historiques, esthétiques, artistiques, et culturels originaux et/ou authentiques ;

- L’emplacement des carrières;

- L’aménagement des décharges publiques ;

- L’ouverture des mines et des forages.

Il est procédé à des études d’impact de ces activités sur l’environnement culturel et naturel préalablement à la demande d’autorisation expresse susvisée.

Les articles 43 et 44 prévoient que les documents de l’urbanisme dont notamment les schémas directeurs, les plans d’aménagements urbains, les plans de développement communal, et les plans d’aménagements touristiques doivent intégrer les dispositions imposées par la protection, la sauvegarde et la mise en valeur du patrimoine culturel en général, et des biens culturels immobiliers classés, ou proposés pour classement, en particulier.

L’autorité gouvernementale en charge de l’Aménagement du Territoire, de l’Environnement et de l’Urbanisme et l’autorité gouvernementale en charge du Tourisme et les Collectivités locales requièrent lors de l’élaboration ou de la révision des documents mentionnés à l’article 43 ci-dessus, l’avis de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture dans tous les cas où des biens culturels immobiliers classés, proposés pour le classement ou
présentant un intérêt pour le patrimoine culturel et/ou naturel, sont concernés.

Effets du classement du patrimoine immobilier

Selon les articles 45 à 56, il est strictement interdit de démolir, de dégrader ou de dénaturer, en partie ou en totalité, un bien culturel immobilier classé et d’en prélever des éléments.
Un bien culturel immobilier classé ne peut faire l’objet de travaux de restauration, de réparation, de construction ou d’adjonction sans l’autorisation préalable de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture.

Il est interdit d’apporter des modifications, quelles qu’elles soient, notamment par lotissement ou morcellement, à l’aspect des lieux compris dans le périmètre de classement, sans autorisation préalable de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture.
Les travaux autorisés sont effectués sous la surveillance des services compétents relevant de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture. Cette dernière doit donner une réponse dans un délai de deux mois (2), à compter de la date de dépôt de la demande.
L’autorisation préalable de bâtir ou de morceler, dans le périmètre de classement d’un bien culturel immobilier, est délivrée par l’autorité compétente conformément à la réglementation en vigueur après l’avis exprès de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture. Le permis de construire ou de morceler n’est délivré que lorsque la construction ou le lotissement projeté, répond aux dispositions légales relatives à la protection, la conservation et la mise en valeur du patrimoine culturel.

Les travaux de restauration et de conservation du patrimoine culturel bâti doivent impérativement, s’ils ne sont pas entrepris par ou sous le contrôle des services compétents relevant de l’autorité gouvernementale en charge de la Culture, ou réalisés par une entreprise spécialisée ou un architecte restaurateur attestant d’une compétence et/ou d’une expérience suffisante dans le domaine, habilités et agréés par l’autorité gouvernementale en charge de la Culture, pour effectuer ces travaux. Une lis