Le ministère délégué chargé de l’Eau compte passer outre la Cour des comptes
Vers le lancement de nouvelles études de reconnaissance et d’évaluation
La loi 10-95 relative à l’eau sera mise au goût du jour. Le nouveau cadre législatif est presque finalisé et sera prêt en 2015, a annoncé un cadre du ministère délégué auprès du ministre de l’Energie, des Mines, de l’Eau et de l’Environnement, chargé de l’Eau, lors d’un atelier national sur la gestion des eaux souterraines, organisé hier à Skhirat. Selon lui, il ne s’agit nullement d’une révision ou d’une modification mais plutôt d’améliorations apportées à certaines dispositions devenues désuètes.
« Il y a certains articles qui doivent être actualisés comme c’est le cas pour les dispositions concernant le dessalement des eaux de mer ou les eaux usées. Cela ne veut pas dire que cette loi est dépassée mais quelques perfectionnements minimes s’imposent aujourd’hui », nous a précisé un cadre de la DRPE.
Pourtant, loi ou pas, tout le monde est d’accord à considérer que la question de la gestion de l’eau dans notre pays demeure alarmante voire catastrophique. Un constat qui n’a rien de nouveau puisque les experts n’ont cessé de tirer la sonnette d’alarme depuis les années 80. Une réalité que confirme aujourd’hui le ministère de tutelle en indiquant que nos ressources en eau sont encore confrontées à la surexploitation et à la dégradation de leur qualité. Le volume surexploité aujourd’hui est de l’ordre de 1 milliard de m3 par an entraînant la baisse quasi-généralisée des niveaux piézométriques au niveau des principales nappes du pays et la réduction des débits voire l’assèchement des sources. En effet, pour les experts réunis lors de cet atelier, les maux du secteur demeurent les mêmes depuis 1995, date de la promulgation de la loi 10-95. Problèmes de gouvernance, manque de contrôle et de suivi, carence réglementaire, résistances des usagers et la liste est longue. «On a l’air de tourner en rond malgré les quelques avancées et progrès réalisés ces dernières années qui sont, du reste, insuffisants vu l’état désastreux de nos ressources hydrauliques», nous a confié un responsable d’Agence de bassins hydrauliques sous le sceau de l’anonymat.
Comment peut-on sortir du cercle vicieux? Le ministère propose d’élaborer un cadre visant le rétablissement d’un équilibre des eaux souterraines qui passe par l’amélioration des connaissances et une évaluation des ressources ainsi que la recherche des possibilités d’augmentation de la recharge naturelle des aquifères. En d’autres termes, il faut engager une nouvelle série d’études et de rapports qui vont certainement engloutir d’autres fonds publics, en ces temps de vaches maigres où le gouvernement est en train de serrer fortement la ceinture au commun des mortels. Une démarche qui ne fera pas le bonheur des juges de la Cour des comptes qui ont épinglé en 2011 le recours injustifié à l’expertise externe et aux études faites et remises sur le métier à plusieurs reprises. A ce propos, ils ont recommandé aux responsables de ce ministère de prendre les mesures adéquates afin d’éviter l’engagement d’études dont l’objet et le contenu sont similaires et de veiller à la mise en œuvre des contrôles requis avant de prononcer la réception des études commandées. Mieux, la Cour a préconisé d’exploiter au maximum les conclusions des études antérieurement commandées et réalisées. Mais qu’en est-il des solutions déjà proposées pour mettre un terme à l’exploitation des eaux souterraines? Qu’en est-il donc des contrats de nappes? Des recharges artificielles de celles-ci?
Et qu’en est-il du contrôle des prélèvements? Silence radio. Pourtant, les langues ont commencé à se délier. Pour plusieurs experts, ces mesures ont montré leurs limites. C’est le cas pour les contrats de nappe qui tardent encore à donner leurs fruits. En effet, plusieurs contraintes ont entravé une mise en application saine de cette mesure. A commencer par la difficulté de définir un contrat-type en la matière. Conçu comme accord technique et financier concerté portant sur la protection qualitative et quantitative des eaux souterraines et la mise en place d’une politique de gestion durable de l’aquifère, ses signataires éventuels ne semblent pas avoir eu la même approche concernant ces contrats. D’autant plus que le respect des engagements s’est révélé difficile à atteindre faute de mesures réglementaires.
Un constat qui en dit long sur l’absence d’une politique efficiente de l’eau au Maroc susceptible de remettre en équilibre les aquifères ou du moins à résorber leurs déficits.
Jeudi 27 Mars 2014
SOURCE WEB Par Hassan Bentaleb Libération
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