Patrimoine immatériel du Maroc : enjeux et batailles juridiques
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Le Maroc fait face à des tentatives récurrentes d’appropriation de son patrimoine culturel immatériel. Entre conflits juridiques et tensions diplomatiques, la protection de cet héritage devient une priorité nationale.
Un patrimoine convoité et revendiqué
Riche de traditions séculaires, le Maroc voit son savoir-faire artisanal et ses symboles culturels régulièrement revendiqués par d’autres pays. Le caftan, le couscous et le zellige figurent parmi les éléments les plus disputés.
En 2022, une controverse éclate lorsque l’équipementier Adidas lance un maillot pour l’équipe nationale algérienne reprenant les motifs du zellige marocain. Face à la protestation de Rabat, l’affaire met en lumière une problématique plus vaste : l’appropriation des traditions marocaines par des acteurs étrangers, qu’il s’agisse d’États voisins ou d’entreprises internationales.
L’huile d’argan, emblème du sud marocain, illustre également cette spoliation. La marque israélienne Moroccanoil, déposée en 2007, empêche désormais d’autres entreprises d’utiliser cette appellation, bien que son produit repose sur une ressource exclusivement marocaine.
Un appel à une convention de l’Unesco contre l’appropriation culturelle
Face à ces défis, Mohamed Lazhar, professeur d’archéologie et de patrimoine à l’Université Ibn Zohr d’Agadir, plaide pour une nouvelle convention de l’Unesco spécifiquement dédiée à la protection du patrimoine immatériel.
« Les conventions existantes se focalisent sur le patrimoine matériel, laissant un vide juridique autour du patrimoine immatériel », souligne-t-il. Il appelle à des règles plus strictes pour éviter des inscriptions abusives à l’Unesco par des États qui cherchent à s’approprier des traditions sans légitimité historique.
Artisanat et savoir-faire en danger
L’art du zellige marocain, transmis de génération en génération, est l’un des nombreux savoir-faire menacés. Malgré sa finesse et son unicité, d’autres pays tentent de s’en attribuer l’origine, sans disposer des artisans ni de la tradition qui en assurent la transmission.
Le caftan marocain, élément central du patrimoine vestimentaire du Royaume, est lui aussi l’objet de polémiques, certains événements internationaux le présentant comme une création algérienne. Pour contrer ces revendications, le Maroc a récemment déposé une plainte auprès de l’Unesco.
Moroccanoil : un précédent préoccupant
Le cas de Moroccanoil révèle les lacunes du système de protection actuel. Bien que l’huile d’argan soit un produit emblématique du Maroc, la marque israélienne détient son exclusivité commerciale. En 2014, une tentative de contestation aux États-Unis par le coiffeur Marc Anthony a échoué, établissant un précédent juridique inquiétant.
Le Maroc, bien qu’ayant obtenu en 2009 une indication géographique protégée (IGP) pour l’huile d’argan, n’a pas empêché cette appropriation. Aujourd’hui, la marque Moroccanoil engrange des milliards sans reverser de bénéfices au Royaume.
Une stratégie proactive pour défendre le patrimoine marocain
Entre litiges culturels régionaux et batailles juridiques internationales, le Maroc doit renforcer sa stratégie de protection. L’affaire Moroccanoil souligne l’urgence d’une vigilance accrue pour éviter que d’autres richesses culturelles ne soient exploitées par des intérêts étrangers.
Pour Mohamed Lazhar, l’Unesco doit adapter ses règles aux enjeux actuels. De son côté, le Maroc doit adopter une politique plus proactive pour défendre son patrimoine immatériel. Car un héritage non protégé risque non seulement de disparaître… mais aussi d’être confisqué.
Le 25/02/2025
Rédaction de lanouvelletribune
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