AVORTEMENT CLANDESTIN UN MOIS POUR LIVRER UNE RÉFORME
RAMID, TAOUFIK ET EL YAZAMI CHARGÉS DE LANCER LES CONCERTATIONS
OBLIGATION D’IMPLIQUER LE CONSEIL SUPÉRIEUR DES OULÉMAS
L’audience royale accordée au ministre de la Justice, à celui des Habous
et des affaires islamiques et au président du Conseil national des
droits de l’homme a donné le coup d’envoi à la réforme de la législation en matière d’avortement clandestin. Le conseiller Fouad Ali El Himma, ici sur la photo, n’est jamais loin des dossiers stratégiques qui engagent l’avenir du pays
Le verrou a sauté: le Souverain a ordonné à Mustapha Ramid, Ahmed Taoufik et Driss El Yazami de s’attaquer à l’avortement clandestin. Le
ministre de la Justice et des libertés, celui des Habous et des
affaires islamiques et le président du CNDH doivent travailler main dans
la main, dans le cadre d’une commission, pour élaborer des propositions
qui serviront de base à la réforme.
En prenant l’initiative sur un dossier aussi complexe et sensible, le Souverain a pris tout le monde de court. C’est même un coup de maître, qui rappelle les grands chantiers qui ont structuré la société marocaine comme le Code de la famille en 2003 ou le discours du 9 mars qui a ouvert la voie à la réforme de la Constitution en 2011.
Ce dossier est si complexe et sensible à la fois qu’il suscite les
passions et divise la société. Cependant, l’approche de concertation
recommandée par le Souverain, dépassionnera à coup sûr les débats. Le
sujet sera abordé dans la sérénité et la plénitude. Il s’agit de mener
les consultations le plus largement possible, pour recueillir les avis
de tous les acteurs concernés. D’ailleurs, l’instruction royale a
également établi un calendrier pour que le dossier soit traité avec
diligence. En effet, les deux ministres et le président du CNDH ont un
délai d’un mois pour remettre au Roi leurs propositions élaborées dans
le consensus.
D’ailleurs, dès la fin de l’audience royale, chacun, selon son domaine, a
vaqué au plus pressé. Les ministres ont convoqué leur staff pour mettre
en place le processus. Driss El Yazami qui prendra en charge, notamment
le volet des droits humains, est déjà sur le pied de guerre. Pour lui,
c’est la réflexion collective, avec l’implication de la société civile,
qui fera avancer ce dossier.
Et pour mieux verrouiller ce travail délicat, le Souverain a insisté sur l’implication du Conseil supérieur des oulémas. Il faudra coopérer avec cette instance pour les différents avis. D’autant que SM le Roi est le Commandeur des croyants. Et à ce titre, il montre la voie. Il s’agit de mener ces prospections dans le cadre du «respect des préceptes de la Chariâ,
de la prise en compte des vertus de l’Ijtihad et de l’accompagnement de
l’évolution et des aspirations que connaît la société marocaine. Et
cela, dans le respect de son unité, sa cohésion et ses spécificités ».
La feuille de route royale pour traiter le phénomène de l’avortement
clandestin sera donc multidimensionnelle.
Avec l’accélération de ce dossier, le Pr Chafik Chraïbi, qui a été le
porte-drapeau de la lutte contre l’avortement clandestin, est
aujourd’hui un homme comblé. Le président de l’Association marocaine de
lutte contre l’avortement clandestin voit enfin aboutir le travail d’une
décennie. D’ailleurs, il y a quelques années, il avait animé une
journée d’études sur la même thématique, organisée par le PJD au
Parlement. Le Pr Chafik Chraïbi avait tenté, avec pédagogie et une dose
de conviction, de sensibiliser les parlementaires aux aspects négatifs
du phénomène. Pour le Pr Chafik Chraïbi, «il est indispensable de
travailler en amont. Cela passe par la vulgarisation de l’éducation
sexuelle qui ne doit plus rester un tabou ». C’est ce qui permettra de
diminuer le nombre de grossesses non désirées. A cela s’ajoute
l’importance de favoriser «l’accès aux moyens de contraception,
notamment la pilule du lendemain, en plus de la garantie de l’avortement
dans de bonnes conditions médicales, afin de réduire la mortalité
maternelle et néonatale», dit-il.
Si dans les rangs du PJD, certains ne sont pas encore arrivés à franchir
le pas, d’autres défendent un point de vue en rupture avec la position
officielle du parti. C’est le cas de Saâdeddine Otmani, président du
Conseil national du PJD et médecin psychiatre, qui est favorable à la
légalisation de l’avortement selon des conditions particulières.
L’ancien ministre des Affaires étrangères cite les cas de viol, de
l’inceste et des malformations génétiques qui auront des conséquences
néfastes sur la santé physique et mentales des nouveau-nés. Sans parler
des dégâts sur le psychisme des femmes qui avortent. D’ailleurs, pour
Jalil Bennani, professeur de psychiatrie et auteur de plusieurs livres,
«les grossesses non désirées peuvent conduire à l’apparition de
pathologies psychiatriques». Cela peut aller des troubles anxieux
jusqu’à la schizophrénie, qui consiste en un détachement de la grossesse
qui peut se solder par un infanticide. C’est le cas également du déni
de grossesse, qui peut causer un choc psychologique.
Saâdeddine Otmani, l’ex-secrétaire général du PJD qui avait élaboré une
proposition de loi sur cette question, réclame depuis quelques temps le
lancement d’un débat public. Cela nécessite du « courage politique pour
prendre les décisions qui s’imposent ». D’ailleurs, au-delà du PJD, la
mayonnaise commence à prendre puisque le salafiste Mohamed Fizazi,
présent lors d’une récente rencontre sur le sujet, a également énuméré
les mêmes conditions que celles de Otmani pour légaliser l’avortement.
Coût élevé
Le coût de l’avortement clandestin est très élevé. Sur le plan
financier, les opérations coûtent plus cher lorsqu’il s’agit
d’interruption de grossesses clandestines. Elles sont estimées entre
1500 DH et 10.000 DH. Il y a également le coût humain à travers la hausse de la mortalité maternelle et néonatale. Ce
qui pousse les partisans de la légalisation de l’avortement à faire
valoir son impact avec une baisse des coûts et du nombre des pertes
humaines.
19 Mars 2015
SOURCE WEB Par M.C. L’Economiste
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