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Année 2016, Quels espoirs pour le tourisme ?

Année 2016, Quels espoirs pour le tourisme ?


D’ordinaire, la veille de chaque nouvelle année est propice aux meilleurs vœux. Bienséants, ils sont quasiment placés sous le signe de l’espoir. Le ministre du Tourisme, invité par la MAP, s’en est donné à cœur joie à cet exercice, formellement optimiste sur toute la ligne. Il s’est interdit tout abandon au désespoir et cession au poids d’une crise qui nourrit les craintes des professionnels. Décidément, Lahcen Haddad est toujours porteur de bonnes nouvelles, même dans les cas les plus désespérés, tel un prestidigitateur dont le secret réside en un passe-passe éloquent. Cadeau de fin d’année oblige!

Le forum de la MAP (agence de presse de l’Etat), nous apprend, ainsi, que tout va pour le mieux et que le Maroc est toujours résilient, crise ou pas. Et si des pays voisins concurrents et marchés émetteurs sont fortement impactés, le tourisme chez nous garde la forme, sinon qu’il se portera encore mieux en 2016. Oui, à croire le ministre, le Maroc n’est pas concerné, comme s’il se situe sur une autre planète à des années lumière. Selon lui, malgré la crise qui s’installe, nous aurons plus d’argent : les recettes qui seront générées par l’industrie du tourisme atteindraient 60 milliards DH, soit une progression de 2% par rapport à 2015. Mieux : Nous accueillerons 10,6 millions de touristes en progression de 3,8%. Rien que cela ! L’argent va rentrer facilement. Les craintes ne sont qu’illusoires. Voilà un discours politique qui ne ménage pas la prudence. Pour Lahcen Haddad, s’il y a crise ressentie, elle est due au secteur informel (sic).

Réalité ou fiction ? Les professionnels donnant l’alarme, seraient-ils à côté de la plaque ? Seraient-ils atteints de cataracte pour que la réalité, décrite en chiffres par Haddad, leur soit peu visible ?

Les faits sont là, irréversibles. La célèbre déclaration, il n’y a pas longtemps, de Driss Benhima , à un quotidien national, illustre parfaitement l’ambiance de crise quand il affirme que « l’hiver serait très froid pour le tourisme marocain ».

Même son de cloche à Marrakech, thermomètre du tourisme au Maroc. Les craintes des professionnels locaux ne sont pas près de s’apaiser, on parle de chutes jamais égalées depuis la crise de 1991. On avance le chiffre catastrophique de -29%, rien que pour le marché français. Sans parler des commandes des voyageurs de l’Hexagone qui reculent de plus en plus, malgré les assurances réconfortantes du SETO et du Quai d’Orsay. Même en décembre, mois habituellement juteux pour les hôteliers de la ville ocre, les hôtels se font implacablement vides et les réservations en chute libre. Cas d’exception pour la destination qui voit ainsi ses indices à la baisse, malgré les offres promotionnelles et les baisses tarifaires tentantes mises en ligne. Agadir, Tanger, Fez, etc, ne font pas l’exception. Morosité et sinistrose sont les mots-clefs annonciateurs d’une année 2016 encore incertaine.

La situation est autant alarmante que rien ne semble rassurer les professionnels. Et ils sont nombreux. Pour Jalil Madih, le spécialiste des croisières, tout indique que 2016 va connaître « une baisse drastique de notre activité. Rien que pour le segment MICE qui est en train de s’effondrer littéralement avec peu d’opérations à l’international , notre activité a dégringolé de 50% à 60%, avec un recul de 50% sur l’activité croisières, dont de gros armateurs habitués des ports marocains, étaient sur le point de déprogrammer notre destination», avoue t-il.

Jalil Madih met le doigt sur un segment qui semble laissé pour compte par l’administration du Tourisme, à l’heure où plusieurs ports du royaume aménagent des quais pour le tourisme de plaisance et pour l’accueil des bateaux de croisière. Quel accompagnement l’administration de tutelle offre t-elle, de son côté, pour être au rendez-vous ? Le Conseil d’Administration de l’ONMT tenu en 2014, sous la présidence de Lahcen Haddad, ne s’était-il pas engagé à développer le tourisme de croisières ? A-t-on abouti à quelque chose en 2015 ? Rien !

Même l’Observatoire du Tourisme peine à s’acquitter convenablement de ses missions. A l’ordre du jour de son Conseil d’Administration 2015, le point est surtout mis sur le renforcement de ses finances et de ses équipes. Une doléance avec des relents de complainte. Question nouvelles stratégies ? Rien à signaler !

C’est pour dire que toutes les composantes touristiques du produit Maroc sont actuellement assises sur des feux ardents.

Et comme un malheur ne vient jamais seul, la saison des grèves dans les entreprises touristiques est bien entamée cette fin d’année. Les grèves silencieuses, il y en a légion, mais celles qui, visibles, portent un coup fatal à l’industrie touristique, commencent à pointer. Pour ne citer que celles de l’Eden Andalou et d’Al Maaden, la situation devient dramatique et les fêtes de fin d’année risquent d’être compromises. Insoucieuse du danger qui se trame, l’administration du Tourisme semble ne pas avoir un droit de regard sur un secteur qu’elle prétend, toutefois, défendre bec et ongles. Et tout indique que rien ne présage de bon pour 2016.

Bon gré mal gré, l’espoir est-il toujours permis, face à l’invisibilité et à la résistance légitime des marchés émetteurs ? A moins d’une baguette magique pour conjurer le mauvais sort, les lendemains meilleurs vont encore se faire attendre. Comme l’avait dit Abdellatif Kabbaj lors du 2ème forum de la CNT, « nous frôlons la catastrophe, avec une très grosse baisse des arrivées et des nuitées ». Y aura-t-il reprise moins catastrophique ? On n’est toujours pas sûr.

La dichotomie discursive du département du Tourisme et des professionnels s’assimile à un dialogue de sourds. D’une part, le ministre du Tourisme, plus politique que proche de la réalité vécue par le secteur, ne veut pas reconnaître qu’il y a bel et bien la crise, de l’autre les professionnels crient leur désarroi sur tous les toits sans retour. Pour départager les deux «camps», la réalité est dure à concevoir : la crise est là, quoi que l’on dise. La nouvelle année, à moins d’un miracle, ne sera pas spectaculaire.

Mais, en guise de bons vœux, gardons tout de même espoir !

Le 29 Décembre 2015
SOURCE WEB Par Tourisme Et Gastronomie

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